Pour s’encanailler à l’ancienne
Si vous êtes nostalgique du vieux Montmartre et du beau monde qui s’y encanaillait, cette biographie romancée d’une légende du cancan est faite pour vous. On ne saurait trouver plus pittoresque que La Goulue, petite blanchisseuse à la cuisse légère (dans les deux sens du terme), qui brilla au Moulin Rouge et ailleurs, posa pour Renoir et Toulouse-Lautrec, eut des amants de toutes sortes, et même des maîtresses, dompta des fauves, se laissa ruiner et finit presque oubliée.
Maryline Martin retrace son histoire en empruntant par endroits l’identité de Jean Marèze, le journaliste qui a soutenu la reine déchue dans ses vieux jours, avec son ami Pierre Lazareff. Si le “prologue“, “l’entracte“ et “l’épilogue“ prétendument rédigés par Marèze ne sont pas très convaincants, en fait de pastiches, le reste du récit est entraînant et agréablement émaillé d’argot d’époque.
La biographe éprouve manifestement une vive sympathie pour son héroïne, ce qui ne l’empêche pas de nous livrer jusqu’aux aspects les plus déplaisants de son caractère et de son comportement. Ainsi, le cynisme, l’âpreté au gain et l’agressivité de La Goulue sont évoqués sans enjolivures. Cependant, Maryline Martin les présente souvent sous un jour cocasse, et avec la sorte de recul allant de pair avec l’idée que le milieu et l’époque étaient pour beaucoup dans le comportement de la danseuse.
Le plus divertissant de ses frasques est à mon sens l’épisode où elle se bat, sur le pont Clignancourt, avec une certaine Aïcha, dont on apprendra plus loin (p. 115) que c’était la future grand-mère d’Edith Piaf !
Très bien documenté, l’ouvrage regorge de citations de textes (articles de presse, livres) anciens et récents. La biographe s’est aussi appuyée sur des extraits du journal intime de La Goulue, conservé au Moulin Rouge, et qui est curieusement resté inédit. (Serait-il impubliable dans son ensemble? Les échantillons qui nous sont fournis ne permettent pas d’en juger.)
Ce qu’on peut regretter, en lisant l’ouvrage, c’est qu’il n’ait pas bénéficié de l’œil d’un vrai éditeur et d’un correcteur. Le premier aurait pu conseiller à Maryline Martin de supprimer les pastiches de Jean Marèze et de placer en fin de volume les notes qui, présentées en bas de page, incitent constamment le lecteur à quitter l’univers de La Goulue pour vérifier les sources de la reconstitution historique. Le second aurait éliminé les maladresses, les fautes de français et les coquilles qui subsistent dans le texte. L’une d’elles (p. 207) porte carrément sur le nom des Editions du Rocher !
agathe de lastyns
Maryline Martin, La Goulue, reine du Moulin Rouge, éd. du Rocher, janvier 2019, 209 p. – 17,90 €.
Je pense chère madame que vous avez du recevoir l’exemplaire presse “épreuves non corrigées”. L’autrice dans un “avertissement” au lecteur (que vous semblez ne pas avoir lu), explique cette liberté d’imagination, cette fantaisie qu’elle se permet dans le prologue, l’entracte et l’épilogue : quelques respirations fictives dans le destin haletant de cette Magnifique Poissarde…Enfin ‚en parcourant votre blog, je vois que vous avez la dent dure avec cette même maison d’édition…recevez chère madame mes salutations littéraires. Gaëtan