Laissez-vous emmener dans le Moyen Age
Le scénario nous conduit dans la France du XIIIème siècle alors que, sous l’instigation du Pape Innocent IV, la lutte contre la sorcellerie prend un nouvel essor. Le héros, Stanislas est ainsi le fils d’un sorcier qui a été lynché quelques années auparavant, alors que lui et sa sœur n’étaient que des enfants. Lors de cette exécution, sa sœur, conformément aux mœurs en usage, s’est vue couper la langue. Depuis, bien que les années soient passées, qu’ils soient devenus des jeunes adultes, ils restent mis au ban de leur village, objets de cette haine que seule la peur de l’inconnu et de la différence sait susciter.
Ce statut de paria fait qu’à l’occasion d’une rixe Stanislas se retrouve enrôlé de force dans une troupe de Croisés sans que nul ne vienne à sa rescousse. Il va lors découvrir la vie épouvantable de la piétaille et des champs de bataille. Mais ce qu’il ne sait pas, c’est qu’il a hérité de son père des pouvoirs étranges, qu’il ne maîtrise pas. Un chevalier a senti cette capacité et le prend sous sa protection, ce qui lui facilitera un tant soit peu pas la (sur)vie, en particulier en l’affectant dans le groupe, a priori peu enviable, des fossoyeurs (d’où le titre du tome).
L’histoire nous est narrée avec un rythme extrêmement vif, bien soutenu par une mise en page qui prend en charge le mouvement lui-même. Les personnages ne sont jamais caricaturaux, mais correspondent bien à notre imaginaire (n’est-ce vraiment qu’un imaginaire d’ailleurs ?) de ce que pouvaient être les êtres rustres et durs du Moyen Age. Le dessin est une merveille d’équilibre entre le détail nécessaire et une trop grande simplification. Et enfin, la couleur !!… ah ! la couleur… c’est un camaïeu d’ocres, de bruns, de marron, de terres de sienne qui nous donne l’impression que la terre, la boue qui entourent les personnages vont déborder de l’image et venir nous envelopper de leur atmosphère tourbeuse. Isabelle Merlet est la personne en charge de la couleur, et, honnêtement, son nom mériterait d’être cité en couverture.
De cette bande dessinée, il n’ya qu’une chose à dire : prenez-là, laissez-la vous emmener dans le Moyen Age, et cela marchera bien mieux que n’importe quelle machine à remonter le temps. Ah, si ! une chose que j’ai détestée : les deux derniers mots qui sont « A SUIVRE ». Je ne veux pas attendre, je ne peux pas attendre, je trépigne !!!
Hervé Soufflet
François Debois & Cyrus (scénario), Annabel (dessin), Magus, tome 1 : “Le fossoyeur”, Glénat, 2009, 48 p. — 13,00 euros. |