Alexie Durand & Sylvain Ferret, Les Métamorphoses 1858 – t.01 : Tyria Jacobaeae

La femme-machine ?

Ce récit met en scène une époque où la science tente de se libé­rer des car­cans pour s’épanouir et ouvrir ce qui devien­dra l’ère indus­trielle. La méde­cine, la bio­lo­gie sont en pleine évo­lu­tion. Les méde­cins peinent à trou­ver des corps pour appro­fon­dir ses connais­sances. La dis­sec­tion est en plein essor comme l’art de l’hypnose.
L’une et l’autre servent de sup­port à une intrigue où se mêlent des rémi­nis­cences de Fran­ken­stein, de La Pou­pée san­glante… L’ombre de Sher­lock Holmes plane avec des clones des Irré­gu­liers de Baker Street. Robert Hou­din, ce fan­tas­tique illu­sion­niste prend part au récit…

Stanis­las Andr­zej et Joseph par­tagent tout. Le pre­mier est détec­tive et le second est méde­cin. Ce der­nier est un fils de famille en rup­ture avec son père alors que l’autre est l’enfant de la nour­rice qui les a éle­vés tous les deux. Très proches l’un de l’autre ils sont, cepen­dant, dans des rela­tions de riva­lité. Ils ont du mal à bou­cler les fins de mois. Émile Dau­ger, un apprenti cou­vreur, vient trou­ver Sta­nis­las parce que Marie, sa sœur, a dis­paru depuis dix jours. Les poli­ciers ne veulent rien faire pen­sant qu’elle est par­tie avec un gars. Le détec­tive n’hésite pas à prendre l’affaire, voyant là l’occasion de gagner quelques sous, d’accéder à une cer­taine noto­riété et en ter­mi­ner avec : “…ses fila­tures pour maris cocus.“
Pour avoir plus de ren­sei­gne­ments sur cette Marie, une jeune cou­tu­rière, il mobi­lise Milo un gamin à la tête d’une bande de gosses des rues. Quelques jours plus tard, Milo lui apprend que ce n’est pas une, mais trois jeunes filles de condi­tion modeste qui ont dis­paru en une semaine dans le quartier…

Avec cette his­toire, la scé­na­riste fait rêver ses per­son­nages à une autre immor­ta­lité en se trans­fé­rant dans une machine ou en y ins­tal­lant le cer­veau, voire l’âme. Pour faire vivre l’intrigue, la scé­na­riste concocte un couple de héros mas­cu­lins unis par des liens tis­sés dès la plus tendre enfance, les liens de lait puisqu’ils ont par­tagé la même nour­rice. Joseph est fâché avec son père et rechigne à en dépendre. Les parents de Sta­nis­las sont issus de la Grande Émi­gra­tion de Polo­nais, qui, après l’insurrection de novembre 1830, ont été contraints à l’exil et ont trouvé refuge en France. Il aime conce­voir des objets nou­veaux met­tant en œuvre les nou­velles pos­si­bi­li­tés tech­no­lo­giques.
Le titre, très intri­gant, est le nom d’un papillon de nuit. La scé­na­riste souhaite-t-elle rap­pe­ler que nombre d’insectes, dont les papillons, mutent de façon spectaculaire ?

La mise en images est de Syl­vain Fer­ret. Avec cette série, il aborde la bande des­si­née. Féru de nou­velles tech­no­lo­gies, des moyens modernes de créa­tion, il réa­lise cet album entiè­re­ment en numé­rique un outil que, au vu du résul­tat, il maî­trise fort bien. Il appré­cie les gros plans, il aime zoo­mer sur des détails pour une mise en scène dyna­mique et du plus bel effet. Le tra­vail sur le contenu des vignettes, sur la pers­pec­tive, sur les cadrages et la mise en scène porte ses fruits.
Un pre­mier tome dyna­mique, avec une intrigue solide appuyée sur un fond his­to­rique et lit­té­raire docu­men­tés, mis en images avec virtuosité.

serge per­raud

Alexie Durand (scé­na­rio) & Syl­vain Fer­ret (des­sin et cou­leurs), Les Méta­mor­phoses 1858 – t.01 : Tyria Jaco­baeae, Del­court, coll. Conquis­ta­dor, jan­vier 2019, 64 p. – 15,50 €.

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