D’un désert et d’un désir sans fin
Cédric Esturillo est un bâtisseur étrange dont les racines remontent sans doute aux avant-gardes du XXème siècle. Néanmoins il habite ses œuvres d’un aspect science-fiction qui mélange macro et microcosme. Existe là un théâtre (mais non son décor) où le jeune artiste crée des rapports nouveaux, paradoxaux, énigmatiques, ludiques mais sérieux tout autant.
Le visible se démultiplie par diverses surexpositions et inclusions pour offrir de nouvelles expériences perceptives. Les dispositifs sensibles ne sont jamais univoques. Si bien que la vision doit retrouver son propre trajet de reconnaissance, l’identification.
Les narrations classiques de l’art en prennent pour leur grade. Le temps, l’espace semblent s’y chevaucher désormais. Et le regardeur doit à la fois faire preuve d’intelligence et d’émotion là où tout se crée sous forme d’émulsions. Libre au spectateur de « rebondir » dessus. Il y a là quelque chose qui dans l’esprit rappelle John Armleder dans sa volonté de réinventer un « fluxisme » et une forme de constructivisme qui se poursuit à travers divers types d’écarts.
Le dessin permet au lyonnais d’adoption d’inventer une ” corporéité ” disparate (du moins en apparence) par laquelle la matière travaille la réversion figurale et la logique habituelle du repli imaginaire.
Esturillo transforme quasiment la surface en une véritable morphogenèse. La surface reste, certes, une frontière mais elle ouvre à une nouvelle condensation de l’image sans renvoyer à une quelconque gloire céleste de celle-ci. Aux effets de représentations événementielles et de limbes, font place des effets d’ombres et de lumières.
jean-paul gavard-perret
Cédric Esturillo, Délice sur Encelade, Galeries Nomades, Galerie l’Antichambre, Chambéry, du 17 novembre 2018 au 2 février 2019.