« La peau lisse des nurses », «Les sept merveilles du monstre », « Tout feu, tout femme » appartiennent aux enquêtes de Benoït Lange. Elles font que la langue se passe sur les lèvres et que la bouche pend avant que la première ne fonde.
Ce qui pourrait être pris comme une pathologie littéraire à l’usage des déliquescents, décadents, incohérents, verbolâtres fait surgir — par la présence de « monstres caractéristiques » — des curiosités propres, moins à l’agonie (sinon de la petite mort), qu’à une renaissance par diverses reprises en mains.
Jean Steff cultive l’art plaire en caressant certaines aberrances plus ou moins étrange. Le malsain des (derniers) outrages devient le denier d’un culte plus ou moins pervers. L’auteur relève ainsi les jupes des histoires mais ne s’arrête pas en si bon chemin. Le terrible devient plus tard l’adorable. Et c’est là la loi d’un genre « policé » qui passe du rejet à l’adoration jusqu’à ce qu’une nouvelle vague viennent écraser et renouveler l’ancienne. Entre cruauté et infamie, la dérive des sens crée l’abîme du sens.
L’assemblage d’aventures autant divergentes que coalescentes déplace la langue dans une chirurgie littéraire en greffant sur le corps ce qui peut le régénérer. Qu’importe si la bouche reste imparfaite : soudain elle n’est plus sans lèvres et peut labialiser de l’inconnu et un certain mystère.
jean-paul gavard-perret
Jean Streff, Les enquêtes sexuelles de Benoît Lange, Editions La Musardine, Paris, 2018.