Maria Schneider fut une femme broyée par le cinéma. Il devint à l’orée de sa carrière le tombeau de ses rêves. Sa cousine (qui s’adresse à elle avec le « tu ») la fait revivre au fil de son désespoir dans la drogue et de sa disparition des studios de cinéma. L’auteure redonne sa vie à celle qui fut réduite à une seule image : celle de son corps dénudé dont elle ne fut jamais « innocentée».
Confinée à la sodomie du Dernier tango à Paris, elle fut une victime sacrifiée et peut-être expiatoire de ce qui ne devait pas être montré. Brando s’en tira indemne, mais la beauté du corps de Maria resta suspecte et suspectée et l’actrice réduite à sa caractéristique physique.
D’elle il ne resta rien mais Vanessa Schneider écrit ici le livre qu’elle devait écrire avec elle afin de montrer qui elle était. Ce livre n’a rien à voir forcément avec le projet original : Maria est morte. Mais cet « esto memor » s’élève contre les clichés et l’image étroite dont elle resta prisonnière en un accident de parcours transformé sépulcre.
L’écriture crée un rendez-vous avec celle que sa mère mit à la porte à 15 ans et que le père (Daniel Gelin) reconnut du bout des lèvres. Alain Delon et Brigitte Bardot l’aidèrent. Mais très tôt elle fut dévorée et solitaire par le « trop des caresses et des coups », de haine et de fascination « people » et à laquelle Patti Smith consacra une chanson hommage.
La jeune femme tacha de cacher ses souffrances et ses angoisses mais ne put répondre à certains excès que par ceux qui l’emportèrent. La violence répondit à une autre. Vanessa Schneider l’écrit sans légende dorée : se découvre de manière touchante et même parfois drôle une femme qui resta ignorée.
jean-paul gavard-perret
Vanessa Schneider, Tu t’appelais Maria Schneider, Editions Grasset, 2018.