« Merci d’éteindre complètement votre téléphone portable » — une consigne familière est donnée par l’ouvreur. Un ouvreur qui continuera de s’adresser directement au public, avec le ton d’un long prélude, ce qui de prime abord déroute – quand le spectacle va-t-il commencer ? — mais qui permet aussi de laisser se dessiner ce qu’on imagine être son intention. Il est là pour chauffer la salle. En prenant ainsi place dans l’espace sonore, on procède à quelque chose comme une inversion des rôles.
L’introduction se poursuit encore, mêlant une invitation à la révolution, indications savantes (mention de la représentation du monde élaborée par Aristote et Ptolémée) et anecdotes plus ou moins plaisantes. On comprend finalement que le spectacle consistera en le prolongement de ce monologue historico-biographique.
Le public est chaud ; cependant, les découvertes galiléennes sont présentées de façon narrative, humoristique et hagiographique, profitant trop peu de ce souffle qu’on avait voulu initier. Jean Alibert exhibe ses capacités de conteur, captivant l’attention par ses propos iconoclastes, à l’allure spontanée, assortissant ses récits de mimiques et de ponctuations bien senties. Pourtant, la représentation ne parvient pas à s’inscrire dans la salle : on est plus dans une situation de café-concert qu’au plaisir d’une scénographie qui aurait su servir le propos.
Certes, les précisions existentielles, les saillies scientifiques, les remarques plaisantes font sens, sont agréablement présentées, mais ne parviennent pas à constituer une dramaturgie théâtrale. On assiste davantage à un one man show qui puise dans les ressources du café-théâtre. Le décor céleste et minimaliste — un cercle de candélabres mis en veilleuse qui entourent le plateau — n’est pas exploité : le jeu s’en trouve réduit à celui du comique démonstratif, peut-être inspiré de la comedia dell’arte.
Ainsi le doute de Galilée est-il affirmé avec vigueur, ce qui convainc, mais non montré, ce qui aurait conquis. Le spectacle se révèle monotone et sans adresse, en dépit de sa volonté de s’adresser à tous.
christophe giolito & manon pouliot
Galilée, le mécano
Texte de Marco Paolini et de Francesco Niccolini
Avec Jean Alibert, mise en scène Gloria Paris
Création son Anouk Audart ; création lumière et scénographie Laurent Berger
Une création et production La Reine Blanche
Au Théâtre La Reine Blanche — Scène des Arts et des Sciences
2 bis passage Ruelle, 75018 Paris
tel : 01 42 05 47 31
https://www.reineblanche.com/calendrier/theatre/galilee-le-mecano
du 14 septembre au 28 octobre 2018, du jeudi au samedi à 20h45, le dimanche à 15h