Il s’agit d’une adresse, presque d’une invective. Sur un plateau nu, noir au fond, un grand tapis rouge. Un mobilier minimaliste : deux néons rouges, deux armoires de vestiaire. On assiste à une dénonciation impeccable de l’idéologie qui maintient les femmes dans la subordination des hommes ; l’appareil de principes qui confine les femmes dans les limites de leur féminité soumise est explicité. Le viol dont l’auteure est victime sert de matrice à la divulgation de la passivité féminine constitutive de notre société.
La prostitution et la pornographie servent de filtre d’analyse révélateur de la volonté masculine de cantonner les femmes au statut d’objets d’un désir réducteur et avilissant. Virginie Despentes livre un réquisitoire précis, virulent et impitoyable contre une société inégalitaire, qui confine la féminité à sa condition de soumission et d’exploitation. Le porno est en effet déconstruit comme image projetée de la femme par les hommes : soumise, disponible, utilisable, méprisable.
Un texte brut, qui procède à une introspection générique : il est question d’une génération, du mensonge de sa libération. A l’encontre de cette dépendance, l’auteure célèbre un mastodonte ravageur et méconnu : King Kong, c’est le symbole d’une sexualité ouverte, riche et sans ambages, qui rendrait aux femmes la disponibilité de leur corps et de leur chatte. Le texte est puissant, mais il n’est pas mis en valeur par la mise en scène, qui reste peu élaborée, semblant chercher à ne pas se départir de la crudité, sinon de la rugosité du texte.
Mais le choix de l’adresse, de la harangue redouble la teneur du livre, et ne met pas en relief son propos. En effet, le verbe virulent est réitéré par la représentation, qui n’en présente pas une lecture, ni même une exhibition, mais seulement une exposition. A peine l’utilisation d’un pistolet à eau pour simuler une éjaculation vient-elle égayer un peu l’atmosphère rendue pesante par le ton uniforme qui redouble celui adopté par l’auteure.
christophe giolito
King kong théorie
Texte de Virginie Despentes
Adaptation de Valérie de Dietrich et Vanessa Larré
Mise en scène de Vanessa Larré
© Photo Stanley Wood Ward
Avec Anne Azoulay, Marie Denarnaud et Valérie de Dietrich
Au théâtre de l’Atelier
1 place Charles Dullin, 75018 PARIS
Tél. location : 01.46.06.49.24
http://www.theatre-atelier.com/king-kong-theorie-lo2407.html
Du 24 mai au 7 juillet 2018
Puis du 4 octobre au 31 décembre 2018
À 21h, du mardi au samedi Durée : 1h15