Une approche réaliste d’une terrible bataille…
La bataille de Koursk, à l’été 1943, a été un des événements décisifs dans la suite de la Seconde Guerre mondiale. Si elle fut relativement brève, du 5 juillet au 23 août, elle fut une des plus grandes batailles du conflit.
L’année 1943 commence par une série de défaites pour le Reich. En février, ce qui reste de la 6° armée capitule à Stalingrad. Les Alliés se sont mis d’accord pour intensifier la guerre aérienne. Ainsi, dans la seule nuit du 24 mai, la Royal Air Force lâche, sur Dortmund, 2 500 tonnes de bombes. C’est ce que recevra toute la Grande-Bretagne durant l’année. En mai, le groupe d’armée Afrika capitule et les U-Boote partent en grand nombre par le fond. Mais, Hitler veut toujours son espace vital et les territoires soviétiques ont une signification majeure pour le peuple allemand. De plus, il a besoin des richesses du bassin du Donets, en Ukraine, et de main-d’œuvre. L’Allemagne a laissé mourir de faim, en 1941 – 1942, près de deux millions de prisonniers de guerre soviétiques. L’offensive de l’été 1943 a aussi pour finalité de s’emparer de main-d’œuvre.
C’est pourquoi s’élabore l’opération Citadelle qui consiste à faire attaquer par deux groupes d’armée le saillant de Koursk et ainsi ouvrir la route vers les territoires convoités. Reportée plusieurs fois l’opération débute le 5 juillet. Mais que de légendes ont été écrites sur ce sujet, d’idées fallacieuses dictées soit par la propagande soviétique ou par des protagonistes qui voulaient minimiser, gommer des erreurs tant tactiques que stratégiques soit par des acteurs désireux de se donner le beau rôle, enjoliver leur parcours. La bataille dite de Koursk est devenue mythique en URSS, symbole de la valeur et de la vaillance de l’Armée rouge, une démonstration du patriotisme insufflé par le régime.
La querelle des chiffres fait également rage quant aux pertes humaines et matérielles. Les données les plus fantaisistes ont circulé et circulent encore. Les approches les plus fiables font état de 1 680 000 hommes perdus au total, Allemands comme Soviétiques, 3 300 avions, 8 700 chars et automoteurs… avec un rapport de 1 Allemand pour 6 Soviétiques, de 1 à 5 pour le matériel.
Le travail d’historien de Roman Töppel cherche, sans contingence idéologiques ou justifications, à approcher la vérité, à cerner les véritables chiffres tant sur les pertes humaines, morts, disparus, prisonniers, que sur les matériels détruits.
Né en Allemagne de l’Est, il a été attiré dès son plus jeune âge, captivé par cette bataille. Il n’a connu, alors, que la version officielle, celle imposée par la propagande soviétique. Devenu adulte, libéré de la pensée officielle, il a voulu cerner la réalité. Et l’on peut estimer qu’il a réussi son pari.
Son livre, d’après des spécialistes libres d’exprimer leurs opinions, fait référence sur le sujet. Voulant être impartial et exhaustif, il donne à comprendre la situation des armées ennemies, les troupes en présence et la façon dont l’art militaire a été employé sachant que du côté soviétique l’attaque frontale a longtemps prévalu dans les états-majors, que les troupes lancées dans ces combats étaient non préparées voire totalement inexpérimentées.
Coédité par les Éditions Perrin et par le ministère des Armées, Koursk, 1943 se révèle passionnant par la présentation de la plus grande bataille de la Seconde Guerre mondiale. L’auteur donne un livre fortement documenté, aux assertions étayées.
serge perraud
Roman Töppel, Koursk, 1943 (Kursk 1943. Die gröβte Schlacht des Zweiten Weltkriegs), traduit de l’allemand par Jean Lopez, Perrin, mars 2018, 304 p. – 21,00 €.