Quand la ville dort en plein jour
Mark Swope s’amuse subtilement avec les architectures de Los Angeles. Mais exit les paysages connus et reconnus. Exit aussi la couleur qui habituellement habille une vision « hollywoodienne » de la cité des Anges. D’autant que le photographe évacue toute présence humaine. Les paysages sont dévêtus, nus et vides. Ils proposent une vision implacable et comme meurtrie de la ville.
Au spectaculaire fait place le spectral. La ville plus qu’assoupie semble morte. Nulle architecture d’avant garde dans de tels décors – ou plutôt leur face cachée : c’est le degré zéro des banlieues, de leurs bords et faces cachées sans pour autant exhiber les quartiers pauvres.
La ville dort en plein jour et Mark Swope en élimine les fragrances. Les zombies restent en retrait et les plages de Malibu sont hors de propos. Le lyrisme de l’image remplace celui qui habituellement est donné en roupie de sansonnet.
Aux apparences trompeuses fait place un minimalisme particulier et âpre mais non dénué d’humour et de beauté. Un tel tissu citadin corrige l’erreur essentielle que les faiseurs attribuent à la ville. D’une certaine manière, ELLE n’est plus ici : mais n’en devient que plus prégnante. Elle brille par tout ce qui en elle signifie une absence.
jean-paul gavard-perret
Mark Swope, Los Angeles river & Los Angeles cornfields, Craig Krull Gallery, Los Angeles, 2018.