Sans le fétiche, tout dans le fantasme serait vide et noir. C’est pourquoi le fétiche n’est pas une mémoire mais une grammaire. Plus qu’il ne ferme – comme on le craint trop souvent –, il ouvre. Et de manière allégorique par la destruction physique d’un plan premier du réel. Le photographe Gilles Berquet en appelle en conséquence à une poétique particulière de l’Imaginaire avec toute l’ambiguïté que cela comporte.
Il prouve aussi que le fétiche est une aventure du langage plastique : celui-là crée quelque chose pour se dire lui-même et donner une réalité à l’indicible.
Cette réalité n’est jamais en expansion – du moins chez Berquet –puisque son but est de cacher. Néanmoins, au lieu de réduire le réel ou de le rétracter, il le biffe pour mieux le montrer puisque l’aporie devient le sens entier. C’est ce qu’Onfray ne met pas ici suffisamment en évidence.
Le fétiche ne crée pas seulement univers symbolique comme on l’a cru longtemps, mais un univers de la pure image. Berquet ne le considère pas comme signe dévalué mais son contraire. Il n’en craint jamais la fécondité créatrice.
jean-paul gavard-perret
Gilles Berquet (texte de Michel Onfray), Le fétiche est une grammaire, Editions Loco, 2018, 240 p. — 49,00 €.