Une chronique douce-amère autour d’un drame
Lucy Asher a été violée et assassinée le 21 décembre, il y a trente ans de cela. Le narrateur, membre d’un petit groupe d’adolescents, raconte la découverte du drame par Pete, au petit matin. Lucy habite le Spit, dans le quartier populaire de New Brighton à Christchurch en Nouvelle-Zélande. Plus âgée que les garçons, elle ne partageait pas leurs activités, n’était pas dans la même classe au lycée. Ils la rencontraient surtout dans l’épicerie de ses parents.
Cependant, le narrateur détaille comment ce drame a changé la vie de cette petite bande qui va, au fil des années, accumuler un énorme dossier pour tenter de trouver l’assassin. Ils réunissent les procès-verbaux, des articles, des pièces de toutes natures en lien direct ou indirect avec la victime. Ils conservent cette masse d’informations dans une pièce qui constitue un véritable sanctuaire, un petit mausolée à la mémoire de Lucy.
Les années ont passé, les enquêteurs obstinés continuent leurs recherches. Et quand ils découvrent le journal intime de la morte, un journal commencé quelques mois avant le viol et l’assassinat…
L’auteur raconte la vie de cette communauté presque exilée sur ce bout de terre qui lutte contre les assauts de l’océan, un territoire menacé, appelé à disparaître. Le Spit marque l’extrémité de Rocking Horse Road, une langue de terre cernée par les eaux, celles du Pacifique sud et celles de l’estuaire formé par la rencontre de deux rivières.
On suit l’évolution de ce groupe d’adolescents, leur vie d’adulte, les mariages, les enfants, la maladie des uns, la mort des autres. Trente ans après, l’assassin court toujours. Avec comme fil rouge cette recherche obsessionnelle du meurtrier, le romancier brosse une chronique sociale, une étude d’une communauté. Il décrit les moments de doute, les instants festifs de ce petit groupe jusqu’à une conclusion surprenante, mais si réaliste.
Avec son atmosphère douce-amère, poignante, ce roman offre une tonalité de lecture particulière qui attache et rend la rupture avec l’histoire bien difficile.
serge perraud
Carl Nixon, Rocking Horse Road, traduit de l’anglais (Nouvelle-Zélande) par Benoîte Dauvergne, éditions de l’aube, coll. “Noire”, juin 2018, 233 p. – 18,00 €.