Peter Stämpfli oblige le regardeur à s’interroger par les effets de détail sur la réalité. Elle est soumise en grossissements au doute comme à la fascination. Inspiré par les affiches monumentales dans les couloirs et stations de métro, il crée des découpes, des montages, des collages pour agrandir des objets et proposer ce qu’il nomma à l’époque « une sorte de dictionnaire des objets, des gestes quotidiens. »
Le catalogue de Robert Storr, ancien conservateur du Moma, et la préface d’Alfred Pacquement, ancien directeur du MAM, précisent l’enjeu d’ensemble des œuvres exposées. Il est complété de nombreuses images et documents. Inspiré par des peintres anglais dont Hockney et Blake, mais aussi par les Américains Warhol et Lichtenstein, Stämpfli invente sa propre conception du Pop Art. Ses toiles surprennent toujours par leurs sujets incongrus isolés sur fond neutre.
Le tape-à-l’œil cher à cette esthétique rejoint chez le Suisse l’abstraction dans un processus qui se complexifie mais aussi s’épure au fil de l’exploration technique de l’artiste. Stämpfli produit en conséquence une œuvre au statut particulier où demeure patente la grande question du secret de l’image. Celle-ci rebondit sur une autre interrogation : trouver qui ou quoi est « le sujet du sujet ».
L’inquiétude reste donc bien la faille ordinaire d’une telle création. Là où l’évidence pourrait régner, tout capote, diverge. L’artiste fait partager le doute dans un lieu où tant d’autres croient offrir des évidences.
jean-paul gavard-perret
Peter Stämpfli, Stämpfli Pop (1963–1964), Galerie GP et N Vallois, Paris, du 14 septembre au 20 ocrobre 2018.