Ésotérisme et Histoire font bon ménage !
Louis XVII a accompli sa première épreuve et revient victorieux à la Nouvelle Héliopolis, le sanctuaire secret des Chevaliers. Tadeo, son maître, venu à sa rencontre, continue sa formation, lui dévoilant une nouvelle arme qui peut prendre la vie, mais aussi la rendre. Ils arrivent au temple où l’attend la seconde épreuve de son initiation, Albedo, l’œuvre au blanc.
Accueilli par les Chevaliers, il est mis au défi de voir au-delà des éléments. Il doit savoir ce qu’est réellement la couronne royale qu’il a rapportée. Sa mauvaise réponse déclenche le courroux de certains alchimistes. Il doit mourir pour renaître s’il en a la volonté, et devra faire face à une nouvelle menace, celle que représente la montée en puissance d’un être avide de pouvoir, capable de détruire l’humanité entière. Il s’agit de Napoléon Bonaparte.
C’est le comte de Saint-Germain qui raconte ce qu’il a pu constater, ce dont il a été témoin quand il a accompagné le général dans son expédition d’Égypte. Il dévoile les véritables raisons de ce voyage…
Cette série mêle ésotérisme, alchimie, histoire de France, quête de l’immortalité et fabrication de l’élixir de vie. Alejandro Jodorowsky a réuni dans son sanctuaire la fine fleur des alchimistes ou supposés tels. Ils ont neuf à vivre de bien longues années. La première page de l’album présente une galerie de leurs portraits et une courte notice les présentant. Il y a, entre autres, Fulcanelli, Imhotep, Jean l’apôtre, Fuxi, un des premiers rois de chine… Cette noble assemblée initie l’ex– futur roi Louis XVII qui a échappé à la mort, laissant un autre cadavre entrer dans l’Histoire.
Une large partie de l’album est consacrée à Napoléon Bonaparte, depuis l’époque où, général aux ordres du Directoire, il mena la campagne d’Égypte jusqu’à son couronnement. Alejandro Jodorowsky le présente sous un jour qui, malgré le côté très antipathique, ne doit pas être loin de la réalité.
Le scénariste signe une fable initiatique, une fable ésotérique et propose moult réflexions autour de la vie éternelle, de la recherche du pouvoir, du destin exceptionnel, de l’accession au rang de dieu, de la capacité de chacun à créer son propre parcours. En contrepartie, il montre avec des images bien efficaces la réalité de la dimension humaine : “Je parle avec un lamentable cadavre en devenir !” ou “Tu n’es qu’un animal que le temps traîne vers l’abattoir. ” Il met en scène, également, les grands principes de l’alchimie, la recherche de la pureté.
Cependant, la richesse du personnage de Bonaparte dans sa quête éperdue, éclipse quelque peu le héros qui n’occupe pas tout l’espace, loin s’en faut. Faut-il le regretter ? Les dissertations philosophiques du scénariste donnent néanmoins du corps au récit.
Rien ne semble difficile à mettre en images pour Jérémy. Il brosse des décors aussi variés que possible, passant avec aisance d’une flotte en méditerranée à des scènes dans le désert, des fastes des palais aux cavernes mystérieuses… Il donne des personnages aux attitudes étudiées et réalistes, une expressivité des sentiments avec le même talent, la même capacité à rendre la réalité. La qualité de ce destin est renforcée par la talentueuse mise en couleurs de Felideus qui, avec ses couleurs chaudes, rehausse l’atmosphère de l’intrigue.
Ce second tome au scénario fourmillant, au graphisme de qualité, conforte tout le bien qu’avait suscité le premier volet de la série.
serge perraud
Alejandro Jodorowsky (scénario), Jérémy (dessin) & Felideus (couleurs), Les Chevaliers d’Héliopolis — t.2 : Albedo, l’œuvre au blanc, Glénat, coll. “Grafica”, avril 2018, 62 p. – 14,95 €.