L’une répond parce que l’autre vient d’écrire. Mais selon une règle précise : un poème par mois et pendant une année « d’exil ». Julie Fuster est partie en Islande un an pour parachever ses études à l’Ecole du Louvre via Erasmus. Marie-Philippe Deloche est restée dans l’hôpital où elle soigne les âmes divisées.
Cette « correspondance » créée par une « rupture » programmée permet un « jeu » (sérieux) facteur de connivence. Et l’éloignement engage la proximité. Pas de raideur entre la fille et sa mère. Une aisance renouvelée voit le jour — même si entre les deux protagonistes il n’y a jamais eu de combat de fauves, bien au contraire.
Mais s’ouvrent soudain, loin des paysages d’enfance, une nouvelle étendue de rivages. Devant les plis des glaciers plus noirs que crayeux Julie Fuster trouve une nouvelle assise. Sous la latitude nordique, rien n’est de glace entre les deux femmes. Et l’intime du partage prend valeur d’universalité.
Au fil des saisons, les sarments tissés à Grenoble trouvent de nouvelles pousses sans débouter les comptines de l’enfance. Proche des cratères aux creux des roches et lorsque la berge de l’Isère s’éloigne, des sources chaudes se réaniment. Dans l’île comme sur le continent pas de solitude au voile d’étain mais une aperture là où la beauté des envois ne sert pas seulement à combler le vide mais dépose de nouvelles strates aux amours maternelle et filiale.
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jean-paul gavard-perret
Marie-Philippe Deloche & Julie Fuster, Plus la neige tombe sur le ciment, Editions Mains-Soleil, St Christol lez Alès, 2018 — 13,00 €.