Boris Bergmann joue de béances sémillantes : de constellations sauvages au sein d’une dérive tropicale qu’il organise afin de sortir des gammes immuables de la représentation : « Je retrouve l’insécurité fondamentale. L’enfance qui surgit. C’est vrai. Au-dessus de la rivière Sanaga, aux bras si larges qu’on croirait à un lac, le vert prend tout. Il n’y a rien d’autre. Pas de ville. Pas de présence. Qui dit que le monde est déjà découvert ? ».
Dans la longue randonnée des vertiges les chemins déambulent. S’y parcourent des paysages qui deviennent la géographie d’une histoire de déprise où il convient de se perdre lorsque les arbres s’approchent les uns des autres.
Le risque n’est pas, en dépit de l’étrange et de la peur : « Je côtoie les singes. Des chimpanzés grands comme des petites filles. Ils ont une force immense. Et pourtant ils ne cherchent qu’à s’amuser. Ils pourraient me casser les os. Et pourtant ils me tirent les cheveux. » Et ce, là où le premier avènement reste celui de la langue. Elle même s’enrichit de tout ce qui arrive dans un contact cinesthésique, physique et charnel. Il ramène à la problématique majeure : celle de l’enfant sauvage.
Qui mieux que lui pour entrer dans le symbolique, dans le langage comme dans les rapports existentiels ?
jean-paul gavard-perret
Boris Bergmann, Je suis l’équateur à vue d’œil, Derrière la salle de bains, Rouen, 2018 — 8,00 €.