Avec Mastrovito, nous entrons dans la fascination et la pénétration de clairières étranges au sein des prises du créateur bergamasque. Sa série de dessins sur bois “Jardin des Histoires du Monde” comme ses installations où les amas se transforment en éparpillements et ruissellements ouvrent un univers féerique parfois sombre, parfois hors du temps.
Il existe des sortes d’extases programmées à l’origine par un arte povera où le papier permet des récits étranges, voluptueux ou tragiques. L’intrigue narrative de certains mythes se transforme dans des scènes rêvées. La jouissance visuelle devient le mot majeur d’une œuvre baroque, exubérante. Le dévoilement est comme décalé pour donner naissance à une fête sensorielle où la liberté semble de mise.
L’ivresse visuelle plonge au-delà du réel pour renvoyer dans l’univers des contes là où la matière première et le dessin abondent mais de la manière la plus ludique qui soit, pour une sorte de métamorphose du réel. L’imaginaire bat la campagne. Il est lié ici à une extension du temps et de l’image là où tout devient labyrinthe oculaire plus que chaos.
Le désir n’est jamais pétrifié, il n’est plus en suspens : il bouge et s’anime en une sorte de frénésie. Comme dans son long métrage NYsferatu — Symphony of a Century. Ce film contient de plus de 35000 dessins. L’artiste y fait revivre le film de Murnau en le réactualisant. Avec Mastrovito, images, dessins, installations ne sont donc pas des prétextes à une sanctuarisation : ils proposent une sorte de fête dionysiaque en ce qui tient d’un « excitare » continu où sont interpellées les puissances de la mort et de la vie.
jean-paul gavard-perret
Andrea Mastrovito, Le jardin des Histoires du Monde, Art Bärtschi & Cie, Genève