Celle qui assume son spleen : entretien avec Trish Haulz ( Feminarum coetium musicorum (The Sound of women))

Trish Haulz offre une vision des musi­ciennes loin des miè­vre­ries et fal­ba­las d’usage à tra­vers un repor­tage sur une ving­taine d’instrumentistes de Mont­réal. La scène fémi­nine et fémi­niste est expo­sée en dehors des pon­cifs exhi­bi­tion­nistes. Les Qué­bé­coises savent faire. Et en toute liberté. Leur vie est là où les femmes ne sont pas des Vénus dégui­sées. Elles font de la musique sans injec­ter des parures super­fé­ta­toires. Ceux qui veulent se rin­cer l’œil n’ont qu’à aller voir ailleurs. Et la musique s’offre des fugues à nulles autres pareilles. Musiques et voix résonnent en appels d’un ave­nir désenclavé.

Trish Haulz, Femi­na­rum coe­tium musi­co­rum (The Sound of women), Gale­rie Humus, Lau­sanne du 10 au 26 mai 2018.

 Entretien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Les rayons du soleil ou un voi­sin qui bri­cole bruyamment.

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Des rêves d’adulte pour le meilleur et pour le pire.

A quoi avez-vous renoncé ?
À tout savoir.

D’où venez-vous ?
Je viens du Qué­bec, un endroit froid qui vit au rythme des sai­sons et qui sait prendre la vie avec dou­ceur mal­gré un trouble iden­ti­taire certain.

Qu’avez-vous reçu en dot ?
Un spleen assumé.

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
Des­si­ner tous les jours au moins 15 minutes.

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres artistes ?
Cer­tai­ne­ment mon enfance nord-américaine et ma vie d’adulte en Suisse, je crois que se sen­tir étran­gère dans son propre pays met à l’épreuve notre tolé­rance et c’est sans doute une bonne chose.

Com­ment définiriez-vous votre double approche pho­to­gra­phies et des­sins ?
J’envisage la créa­tion comme une impul­sion qui peut s’exprimer de mille manières, j’expérimente, j’essaie, je déve­loppe, la tech­nique ou le sup­port est acces­soire tant que l’envie existe. L’essentiel étant d’user de ces émo­tions pour se faire encore et encore.

Quelle est la pre­mière image qui vous inter­pella ?
Un wagon de métro com­plè­te­ment graf­fité et tagué en 1989 à Montréal.

Et votre pre­mière lec­ture ?
« Archie et Vero­nica », un comics amé­ri­cain dont la tra­duc­tion qué­bé­coise était pleine de surprises.

Quelles musiques écoutez-vous ?
Tout et rien, ques­tion trop vaste.

Quel est le livre que vous aimez relire ?
« Éloge de la fuite » d’André Laborit.

Quel film vous fait pleu­rer ?
« Mar aden­tro » (The sea inside) de Ale­jan­dro Amenabar.

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
Des yeux curieux.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Aux per­sonnes que j’ai bles­sées et je n’en vois pas l’utilité.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Bom­bay pour ses odeurs.

Quels sont les artistes et écri­vains dont vous vous sen­tez le plus proche ?
J’aurais du mal à me pré­tendre proche des cer­tains artistes que j’apprécie. Je suis proche de la société dans laquelle j’évolue, elle m’influence, me défie, me choque. Je sens une proxi­mité avec toutes les per­sonnes qui créent quelque chose à par­tir de rien avec leur seule imagination.

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
De l’amour…comme tout le monde je crois.

Que défendez-vous ?
J’ai décidé de ne rien défendre, mais je me bats constamment.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Si per­sonne n’en a et que per­sonne n’en veut, Lacan ne parle pas d’amour mais plu­tôt de mort. Il me semble faux de pen­ser qu’on ne peut pas don­ner de l’amour et il encore plus faux de pen­ser que l’on n’en veut pas. Je pense que tout un cha­cun en veut plus qu’il n’en donne. L’Amour n’est pas si com­pli­qué, gamine, je tom­bais amou­reuse toute le semaine.

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?“
Une bou­tade mais pleine d’optimisme, autant dire oui et on en cau­sera plus tard si nécessaire.

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
Que créez-vous par les temps qui courent ?

Entre­tien et pré­sen­ta­tion réa­li­sés  par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 17 mai 2018.

1 Comment

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One Response to Celle qui assume son spleen : entretien avec Trish Haulz ( Feminarum coetium musicorum (The Sound of women))

  1. Musika

    Ça sonne juste, cest direct et ça me plait, cest comme ma bat­te­rie, comme la crea­tion, ce que je cree, comme une impul­sion, oui, incli­nai­son de ma tête.

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