Bachan (dessin) / Morvan (scénario), Nirta Omirli — Tome 1 : “Un Jeu cruel”

Une guerre civile entre aliens et colons humains, une nef spa­tiale à la déroute… mais où Mor­van va-t-il s’arrêter ?

Jean-David Mor­van est un scé­na­riste pro­lixe. Il a créé la char­mante Nävis de Sillage, repris le Mer­lin de Sfar et publié une quin­zaine d’albums l’année der­nière. Depuis quelque temps, il s’attaque même aux mânes de Spi­rou, c’est dire ! Il nous avait agréa­ble­ment sur­pris der­niè­re­ment avec les pre­miers tomes de Fléau.world (chez Dar­gaud) et de Je suis morte (chez Glé­nat), deux albums réa­li­sés par des des­si­na­teurs peu connus…

Pour Nirta Omirli, Mor­van manœuvre dans la grande tra­di­tion de la SF. Les casques bleus de l’OPU (Orga­ni­sa­tion des Pla­nètes Unies, sans doute) quittent une pla­nète où ils ont résolu le pro­blème qui oppo­sait les colons humains aux aliens autoch­tones. Pas de chance, après quelques années d’hibernation, leur vais­seau est tou­ché par des mis­siles tirés de ladite pla­nète. Seules six per­sonnes sur­vivent, un ami­ral et cinq sol­dates. Et pas de chance encore, il n’y a que cinq places dans l’unique navette de secours. Pen­dant ce temps-là, au sol, la guerre civile a repris de plus belle.

 Le pro­blème de cet album, c’est que Mor­van veut trop y mettre : son obses­sion de la guerre, ses inter­ro­ga­tions sur les rap­ports hommes-femmes, son inté­rêt pour les situa­tions de ten­sion… Résul­tat, rien n’est com­plè­te­ment achevé.

Il a déjà évo­qué la guerre et le ter­ro­risme dans Sillage, mais il veut ici les pré­sen­ter dans toute leur com­plexité déses­pé­rée, dépouillés de tout mani­chéisme. Pour­tant, il ne se laisse qu’une dizaine de planches pour trai­ter de ces ques­tions. Ce qui est court, trop court. Sur­tout quand on semble se réfé­rer à des conflits actuels.

La dimen­sion thril­ler du scé­na­rio est beau­coup plus exploi­tée, et convainc davan­tage. Dans ces pages dépour­vues d’action, les auteurs déve­loppent une sacrée ambiance. Six per­son­nages qui doivent s’entraider pour s’en sor­tir, tout en sachant que l’un d’eux ne sera pas du voyage retour, voilà un thème digne d’Alien. Et en ajou­tant à cette ten­sion de base une légère pointe de fémi­nisme, ça pou­vait deve­nir vrai­ment inté­res­sant. Mais ce der­nier aspect du scé­na­rio n’est qu’effleuré dans cet album ; dom­mage… ça avait bien commencé.

Bachan, le des­si­na­teur qui a joué des pin­ceaux sur cette his­toire, est mexi­cain. C’est un afi­cio­nado des comics, et ses visages, avec leurs mâchoires car­rées et leurs grandes bouches, portent bien la marque de sa culture amé­ri­ca­ni­sante. Quant à son trait, même s’il fai­blit par­fois un peu au niveau des gros plans, il reste vif et se prête bien aux scènes d’action. Bref, un des­sin qui ravira les ama­teurs de DC, sans rebu­ter les autres.

 En one-shot, ou en dip­tyque, cen­tré sur les ten­sions qui agitent les six per­son­nages dans le vais­seau en détresse, Nirta Omirli aurait pu faire un excellent thril­ler psy­cho­lo­gique. Mor­van a délaissé le huis-clos pour se lan­cer dans un pro­jet de série plus vaste. Il en résulte un album avec de très bons pas­sages, pour­tant on ne pourra se pro­non­cer défi­ni­ti­ve­ment qu’à la lec­ture du second tome.

Mar­tin Zeller

   
 

Bachan (des­sin) / Mor­van (scé­na­rio), Nirta Omirli — Tome 1 : “Un Jeu cruel”, Les Huma­noïdes Asso­ciés, avril 2004, 56 p. cou­leur — 12,60 €.

 
     
 

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