Nicole Vedrès, Paris 1900

Du bon et du moins bon

Ce cof­fret réunit les deux longs-métrages de Nicole Vedrès, Paris 1900 et La Vie com­mence demain, des courts-métrages et un por­trait filmé de la réa­li­sa­trice, par Jean-Claude Ber­ge­ret, datant de 1964. Un livret joli­ment édité est joint aux DVD, qui nous apprend entre autres que Chris Mar­ker a été influencé par Paris 1900 (texte de Laurent Véray).
Le pre­mier long-métrage de Vedrès, qui date de 1946, est un film de mon­tage réunis­sant des actua­li­tés et quelques extraits de fic­tion de la Belle Epoque. Alain Resnais, alors tout jeune, y a col­la­boré. On peut y voir (entre autres) l’inauguration de la pre­mière sta­tion de métro pari­sienne, la nais­sance du style « art nou­veau », la Belle Otero en train de dan­ser, et Colette cares­sant des char­treux (un chat par main). Quelques aper­çus des spec­tacles les plus en vogue nous per­mettent de mesu­rer la dif­fé­rence entre les grands acteurs de théâtre de cette période et ceux de nos jours : les tra­gé­diens d’alors ont tous l’air de faire du burlesque.

Dans un autre registre, Nicole Vedrès a choisi de nous mon­trer Renoir, les mains abî­mées par l’arthrose, qui conti­nue de peindre mal­gré cela, et Apol­li­naire en « pho­tos ani­mées », l’air facé­tieux – poi­gnant quand on songe au peu de temps qu’il lui res­tait à vivre. La grande inon­da­tion pari­sienne de 1910 donne lieu à des images sai­sis­santes. A par­tir de là, le récit fil­mique prend un ton plus sombre, pour évo­quer les évé­ne­ments qui ont conduit à la Pre­mière Guerre mon­diale. Ce film de mon­tage cap­tive l’attention du début à la fin. On en sait gré à Nicole Vedrès d’avoir retrouvé tant d’images des années 1900, qui auraient pro­ba­ble­ment dis­paru sans elle.
A priori allé­chant, La Vie com­mence demain (1949), qui réunit Jean-Pierre Aumont, Picasso, Jacques Pré­vert, Gide, Sartre et d’autres « phares » de l’époque, s’avère arti­fi­ciel et mal joué (pour ceux qui n’y figurent pas à titre d’interviewés) ; pire encore, la plu­part des dis­cours qu’on y tient sont d’un obso­lète que le spec­ta­teur d’aujourd’hui peut trou­ver hila­rant ou exas­pé­rant. Je don­ne­rais la palme à Sartre en train d’expliquer à « l’homme ordi­naire » (incarné par Aumont) qu’il est res­pon­sable, étant un « bour­geois », de tous les maux du monde, y com­pris des faits divers – une théo­rie qui convainc « le bour­geois », puisque c’est un esprit indis­cu­ta­ble­ment supé­rieur qui lui parle.

Les courts-métrages de Vedrès ont eux aussi très mal vieilli. En revanche, son inter­view fil­mée com­porte nombre de pro­pos pas­sion­nants, dont ceux qui concernent Alain Resnais.

agathe de lastyns

Nicole Vedrès, Paris 1900, cof­fret de 2 DVD, Doriane Films, mai 2018, durée totale 235 minutes. – 18,99 €.

Leave a Comment

Filed under DVD / Cinéma

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>