Claire Favan, Dompteur d’anges

Quand les anges deviennent des démons 

Max Ender, est arrêté très jeune, pour le meurtre d’un enfant. Tout semble l’accuser : son ADN est retrouvé sur le corps, et il est le der­nier à avoir vu l’enfant, dont il était très proche. Et pour­tant, il n’a pas com­mis ce crime. Son inno­cence va être prou­vée seule­ment après cinq ans. Cinq longues années pas­sées dans un des péni­ten­ciers les plus durs, aux côtés de pri­son­niers qui lui font payer cher tous les jours d’être un tueur d’enfant. Max res­sort de pri­son, brisé, mais avec sur­tout la rage au cœur et une seule idée : se ven­ger de cette com­mu­nauté qui l’a mise der­rière les ver­rous sans jamais dou­ter une seule fois de son inno­cence.
Il va mettre en oeuvre un plan machia­vé­lique et frap­per là où cela fait le plus mal en enle­vant les enfants de ces prin­ci­paux accu­sa­teurs. Et chaque jour qui passe, il va faire de ces petits ‘anges’ de véri­tables ‘démons’ prêts à com­mettre vols et même meurtres pour Max, en leur incul­quant la haine de la société. Une de ses ‘créa­tures’ finit cepen­dant par lui échap­per, et va tota­le­ment dis­pa­raître …mais pourra-t-elle vrai­ment se (re)construire une vie stable ?

Claire Favan a pris en quelques années sa place dans le monde du thril­ler fran­çais. Elle n’hésite pas à cam­per un uni­vers très sombre, en marge des normes sociales, et pousse loin le pro­fil psy­cho­lo­gique de ses per­son­nages. Ce fut déjà le cas avec Serre-moi fort ou Miettes de sang, et avec Domp­teur d’anges elle conti­nue sur cette lan­cée. Ici, la mani­pu­la­tion men­tale au ser­vice d’une ven­geance est au cœur de l’intrigue. Le lavage de cer­veau que subissent les enfants enle­vés par un ex-innocent guide le lec­teur dans les recoins les plus sombres de tueurs.
En kid­nap­pant ces jeunes ‘anges’, Max Ender en fait ses véri­tables marion­nettes, et les amène à haïr la société qui les a oubliés. Cette asso­cia­tion de mal­fai­teurs donne libre cours à ses pires ins­tincts, pour sur­vivre mais aussi pour le plai­sir de nuire.

Le roman connaît quelques temps morts, par­ti­cu­liè­re­ment lors de la ‘réédu­ca­tion’ et du lavage de cer­veau des enfants. Durant cette période, les scènes sont un peu répé­ti­tives, à l’image des dures jour­nées pas­sés par ces enfants. Les scènes de tor­ture ne sont pas épar­gnées au lec­teur, qui doit vrai­ment pas­ser une cen­taine de pages pour être enfin cap­tivé par l’histoire sans en être écoeuré. Car les deuxième et troi­sième par­ties du roman vont réser­ver de nom­breuses sur­prises au lec­teur, qui pour­rait même s’attacher à celui qui a réussi à s’enfuir …pas tota­le­ment indemne cepen­dant.
Au centre du roman, dont l’ambiance peut aussi par­fois faire pen­ser à l’incroyable série télé­vi­sée Dex­ter (tirée du roman epo­nyme), l’idée de faire jus­tice soi-même amène à réflé­chir sur les dérives de cette société amé­ri­caine où le port d’arme est (presque) aussi facile d’accès que d’acheter des bon­bons dans un drug-store.
Les failles du sys­tème judi­ciaire autorisent-elles à répa­rer soi-même les injus­tices subies ? Punir les méchants en deve­nant soi-même un tueur met très mal à l’aise, mais pas autant que le sen­ti­ment qui s’empare du lec­teur et qui lui ferait presque pen­ser qu’il ne reste que cette solu­tion aux sur­vi­vants… Et le voilà lui aussi mani­pulé, comme ces anges qui auront bien du mal à trou­ver la rédemption.

Un roman qu’il est dif­fi­cile de lâcher, et qui jouera avec vos sen­ti­ments les plus troubles. Mais serez-vous domp­tés et réussirez-vous à sor­tir indemne de la cage de Max ?

franck bous­sard

Claire Favan, Domp­teur d’anges,  Pocket, 2018, 448 p. – 7,80 €.

 

Leave a Comment

Filed under Poches, Pôle noir / Thriller

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>