Le féminisme édulcoré de Janelle Monae
Dirty Computer est le parfait exemple de la production black US. L’album est empreint de la provocation douce d’un R’n’B aseptisé en ses sonorités et d’un rap parfois violent en ses termes. Le tout non sans qualité « plastique» et harmonique. Parfaitement produit, l’opus se voudrait afro-futuriste et innovant. Mais cela reste plutôt léger et noyé sous un amas de guest-stars en casting (de Prince post mortem, Brian Wilson, Ravit, Wonder, etc.)
Certes, l’artiste reste militante et féministe (son Pink plutôt réussi parle par exemple de l’intimité féminine avec des mots de femmes). Mais un discours ne suffit pas à faire un chef-d’œuvre Est perdu l’aspect « Metropolis » de son premier album. L’artiste et actrice s’est assagie voire perdue en route, victime de l’entertainment américain, celui-ci lui ôte son côté original.
Certains morceaux sont écoutables voire plus, d’autres se limitent au tout-venant C’est presque du Beyonce, du Jennifer Lopez voire du Janet Jackson (si on est un peu méchant) et même pas du Tori Amos. Bref, rien d’identifiant en dépit de sujets qui auraient pu être sensibles mais ne sont plus que des arguments de promo.
Parfait exemple de musique interchangeable et banale, le prétendu futurisme se trouve édulcoré au sein d’un featuring aussi étouffant que branché au moment où il est devenu une panacée liée à la culture hip-hop RNB. A la fois elle patrouille et patouille ici en vacuité (à l’exception de la présence de Brian Wilson et sa madeleine). On aura compris que ce Dirty Computer reste à des années-lumières de OK Computer qui plaça Radiohead au firmament de la musique dite populaire.
jean-paul gavard-perret
Janelle Monae, Dirty Computer, Label Bad Boy Records, 2018.