Sylvain Runberg sait créer des univers futuristes passionnants tout en privilégiant action et équipée. Avec cette série, qui touche à sa fin, il renoue de belle manière avec le space opera, l’aventure spatiale. Mais, au-delà des combats et de la volonté de vengeance d’un père ayant perdu son fils, il développe nombre de thèmes humanistes et pointe des maux bien réels de notre société tout en s’appuyant sur des situations et des événements actuels ou très récents. Le mariage de ce président frimeur avec une actrice n’est pas sans rappeler celui d’un petit président camelot avec une chanteuse. La campagne contre une femme à l’égo démesuré évoque une politicienne avide d’avantages, d’honneurs et camouflant sa réelle personnalité sous des dehors simplistes. Un ex-conseiller qui se présente face à son patron est un élément très présent de l’actualité.
Sur la planète présidentielle, Vexton, le président sortant, débat avec Rebecca Veri, son ex-conseillère à la veille des élections prochaines.
Dans le Jolly Roger, Jon Tiberius Munro rappelle le plan accepté à la majorité, à savoir que le vaisseau piloté par des humatronics s’invite en plein mariage présidentiel sur le satellite spécialement construit pour la cérémonie. Les passagers vont s’éjecter dans leur navette avant que le vaisseau active ses boucliers de protection et détruise le satellite.
Parallèlement, les autonomistes lancent des offensives éclair sur sept planètes confédérées, visant uniquement des objectifs de police et militaires. L’objectif est de semer la panique dans la Confédération avant l’attaque de la planète présidentielle. Mais, sur le warship, le plan ne fait pas l’unanimité. Kowalski ne se rallie à la majorité qu’à contre-cœur et les Touaref, le couple de scientifiques, veut retrouver sa liberté. Ils ont effectué leur mission et restent indifférents à la vengeance de Munro. Face au refus de l’ex-général, les deux scientifiques pensent trouver un allié potentiel, en la personne de Treize, pour leur fuite.
Du côté de Rebecca qui a de très bons sondages, le soutien du général est vacillant. Celui-ci se rend compte que la promesse de la jeune femme quant à une amnistie de Munro passe à un plan très secondaire. Elle espère que le fuyard ne se laissera pas prendre vivant, réglant ainsi la question…
L’auteur met en scène une galerie de personnages fort bien campés, tous bien étudiés pour leur rôle tant pour ceux à ranger dans le camp des « bons » que pour ceux qui assurent le rôle de « méchant ». Le scénariste donne un récit dynamique, aux rebondissements variés et multiples. Il met en œuvre un ensemble d’actions dramatiques avec des retournements d’alliances et révèle le vrai visage des protagonistes. Il offre ainsi une belle gamme des sentiments, émotions et motivations du genre humain.
Miki Montlló assure un graphisme dynamique, proposant des vues de l’espace de toute beauté, des pages bien remplies aux détails pertinents, osant des cadrages et des angles de vue appropriés et hardis. Les couleurs préparées par Yuri Shepherd et finalisées par Montlló participent de manière efficace à la tonicité du scénario.
Avec Waship Jolly Roger, Sylvain Runberg propose un beau space opera, stimulant, énergique, de belle facture, servit par un graphisme de qualité.
serge perraud
Sylvain Runberg (scénario), Miki Montlló (dessin et couleurs) & Yuri Shepherd (couleurs), Warship Jolly Roger – t.4 : Dernières volontés, Dargaud, avril 2018, 56 p. – 13,99 €.