Cahier des charges pour tout amant de passage (mais pas que)
La genevoise Barbara Polla — pour son premier livre de poème écrit directement en anglais – met la barre très haute. L’homme certes n’est jamais pour elle une souche phalliquement indifférente (elle à même écrit un livre sur l’érection…) mais, quoique sensible à ses charmes, elle lui demande de ne pas simplement se conduire en hôte de ses bois et des forêts des sens. En rien oie blanche, elle ne lui réclame pas forcément des prodiges (dont il est serait souvent peu capable) mais une attention notoire envers son plaisir de femme.
Le livre au goût de miel sent néanmoins le souffre. Sa radicalité est bien supérieure aux univers absconds des « métaphysichiens ». La doctoresse se veut certes égérie mais demande son dû. Son royaume n’est en rien victorien. En lui la sensualité prolifère. Et les amants doivent l’exacerber en un juste retour — et pas seulement du refoulé. Ils ne peuvent rester indifférents ou impassibles.
La poétesse refuse le statut de comtesse de Ségur ou de tortue de mère. Son livre devient la juste requête de toutes les femmes à leurs partenaires. Barbara Polla ne se satisfait pas des huiles de bisons des testicules biliaires. Et si tout est bon dans le jambon comme dans la charcutière, il convient à ses consommateurs de se changer en convives plus qu’amènes envers elle.
Pour que son corps devienne céleste et extatique, il convient d’en extraire le substantifique orgasme. Julien Serve par ses dessins aide — au besoin — à en indiquer la voie.
jean-paul gavard-perret
Barbara Polla, Ivory Honey, dessins de Julien Serve, New River Press, Londres, 2018.