Tania (Brassesco) et Lazlo (Passi Norberto) figent souvent dans le temps à travers leurs séries de scènes de vie à des époques différentes, Le Temps d’un Silence reprend cette perspective en une histoire à plusieurs entrées et niveaux de lecture. C’est l’histoire d’une femme en recherche d’inspiration qui se sent enfermée dans une condition qui n’est pas la bonne. Elle cherche à se libérer à travers les arts et la nature telle une insomniaque rêveuse. Aux flambeaux du dicible se mêle la brûlure de ses dérives qui font d’elle un chaperon rouge en quête du loup.
A la recherche de son inconscient, elle se confronte à ses démons, à son passé, mais toujours avec le regard tourné vers l’avenir. Ce passé est tel un murmure qui se transmet de mère en fille, mais selon une ténuité, un « à peine, à peine » (Beckett). Si bien qu’une telle héroïne vaque dans un champ de silence où la vision devient l’accroche à la fois d’une perte et d’un recommencement En filigrane s’instruit la perpétuelle histoire de l’art et de ses interrogations. Qu’importent les nouveaux moyens, les artistes se retrouvent confrontés aux mêmes questions là où le spleen fait l’idéal dans de tels récits oniriques.
La femme devient la Sibylle de l’expression de l’ineffable. Tania et Lazlo la flairent, l’attendent, la poursuivent, reviennent dans les endroits qu’elle hante et où l’image fourche en des lieux d’immersion profonde et de volupté immobile. Entre la profondeur de l’ombre et les vapeurs matinales, une certaine absence à soi-même rend l’aube comme le crépuscule incomparable.
Tout demeure en syncope : un fantôme brouille le réel à mesure que le corps (de la femme ou de l’art) retrouve son élan.
jean-paul gavard-perret
Tania & Lazlo, Le Temps d’un Silence, Editions Galerie Ségolène Brossette, Paris, 2018.