Collectif, Mydriasis

La nuit nue

Irwin Barré, Simon Cambon-Andreani ainsi que les gra­phistes Clé­men­tine Léon et Gau­tier Serra (du « Ser­vice Local » — Lyon) pro­posent en 400 pho­tos divers spots techno du monde en échap­pant à toute vision clas­sique et dans le but de mon­trer des « ombres » ou zom­bies sou­vent pas­sés sous silence des raves, free par­ties et du milieu queer. La struc­ture du livre est par­faite car son puzzle oblige le lec­teur à faire son che­min dans des images qui sug­gèrent divers sen­ti­ments. Il ouvre aussi tous les pos­sibles en jeu dans ces fêtes extrêmes qui n’ont rien à voir avec le cadre asep­tisé des clubs et leur public ins­ti­tu­tion­nel.
Le col­lec­tif montre com­ment les acteurs de l’instant s’osent dans des lieux impro­bables (car­rières, friches, forêts) pour don­ner libre cours à leur corps et leur esprit en affir­mant leur dif­fé­rence mais sans osten­ta­tion. Il ne s’agit en rien, au sein de tels lieux, de faire spec­tacle ou de l’effet mais sim­ple­ment de se lais­ser aller en un lâcher prise  que tra­duit des images brutes presque vio­lentes sans la recherche d’un parti pris esthé­tique affi­ché sinon celui de faire res­sen­tir ce qui se passe.

Dans ces œuvres sur­gissent des espaces étranges qui sortent des registres offi­ciels. Ce tra­vail parle sans jamais de réponse si ce n’est au néant que les offi­ciants de tels offices païens viennent contra­rier en cher­chant des effets de cha­leur et d’ivresse. Le lan­gage pho­to­gra­phique reste aux aguets der­rière des pans qui s’entrechoquent.
L’espace livresque se fait donc châsse afin de conte­nir une sorte de désir avec ou sans visage pour des yeux plein de secrets. Par les effets de sur­face, le regard per­cute para­doxa­le­ment une forme d’impossibilité de voyeu­risme. Les quatre auteurs repoussent tout effet de mélan­co­lie et d’effroi dans une approche qui devient un point de sorte de point non retour  et de capi­ton là où l’extase pro­vi­soire est recher­chée dans la vas­ti­tude de lieux hors cadres et à l’écart des effets de représentation.

Des pos­si­bi­li­tés nou­velles, de type impres­sion­niste, s’inscrivent par la force de la struc­ture du livre. Il brise l’espace géo­mé­trique clas­sique et cherche à désobs­truer les images pour pré­pa­rer l’art à une autre fin que la mime­sis à tra­vers pour­tant celles et ceux qui nous res­semblent même si nous ne nous recon­nais­sons pas.

jean-paul gavard-perret

Col­lec­tif, Mydria­sis, Ullule,  2018, 224 p. — 15,00 €.

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