En Ukraine, quelques mois après l’explosion de Tchernobyl, des groupes de chasseurs sont constitués pour abattre les animaux errants irradiés. Kolia, un jeune garçon suit son père dans ces battues. Pravda, un ancien de l’armée rouge, veut mettre à son tableau de chasse un grand chien noir insaisissable qui a appelé Le roi des chiens.
Kolia découvre dans une église un passage qui l’amène au cœur de la centrale. Il est accueilli par un groupe d’enfants.
Le second volet du diptyque s’ouvre sur le grand chien noir avec, en cartouche, des vers de L’Apocalypse sur fond d’une centrale en perdition. Kolia est intégré dans le groupe des enfants. Ceux-ci s’amusent à plonger dans la cuve de refroidissement pour aller voir le robot, enfin ce qu’il en reste.
Alors que Pravda est tétanisé sur la remorque remplie des têtes de chien abattus, les enfants se décident à sortir pour se ravitailler. Ils se rendent compte qu’une fois encore, ils ont été abandonnés. Sur le cadavre d’un homme, ils prélèvent une liasse de billets.
Le père de Kolia, est trahi par un de ses acolytes et fait prisonnier par un groupe de chasseurs concurrents. Mais le prix payé par les autorités pour un gamin est bien plus élevé que celui d’un chien. Comme certains sont prêt à tout pour de l’argent…
Sur les pas de Kolia, Aurélien Ducoudray dépeint la vie de ceux qui sont restés dans, ou à proximité, de Tchernobyl. Il réalise, avec son diptyque, un reportage sur les conditions d’existence de ceux qui, volontairement ou non, sont restés dans le périmètre de la centrale. Cette zone, encore fortement contaminée, offre cependant un “refuge” à ceux qui fuient les guerres, les crises. Ils peuvent y trouver une existence plus paisible.
Dans ce second tome, le scénariste porte son attention sur des enfants vivants dans les décombres de la centrale, des enfants abandonnés depuis la catastrophe pour de multiples raisons. Ils survivent malgré les malformations, les maladies liées aux irradiations. Ils se sont regroupés autour d’une jeune adolescente. Mais, s’ils connaissent des combines pour subsister, ils restent, malgré tout, des enfants inconscients des risques.
Le reportage fait place aussi à une belle intrigue et une savoureuse histoire entre ces enfants pourchassés et ces chiens traqués. Le scénariste met en scène une galerie de chasseurs, des individus aux sentiments équivoques, acceptant de tuer les chiens errants, mais refusant de perdre celui, ou ceux, qui leur sert de compagnon. Il développe aussi l’émotion avec une scène où deux garçonnets paient une prostituée pour qu’elle leur lise une histoire et les presse contre elle comme le fait une mère.
Christophe Alliel, avec son dessin semi-réaliste, donne vie à un ensemble de personnages expressifs, dans toute la gamme des sentiments, allant de l’amour à la haine. Il plante des décors menaçants, fait vivre ces lieux en ruines de façon fort réussie. Magali Paillat apporte, avec sa mise en couleurs, une réelle plus-value à cette atmosphère lourde, angoissante.
Les Chiens de Pripyat se lit avec un grand intérêt, tant pour l’intrigue, la galerie des personnages, le regard porté sur une population sacrifiée, que pour le graphisme attractif.
serge perraud
Aurélien Ducoudray (scénario), Christophe Alliel (dessin) & Magali Paillat (couleurs), Les Chiens de Pripyat — t.2 : Les enfants de l’atome, Bamboo, coll. Grand Angle, janvier 2018, 56 p. – 14,50 €.