Aurélien Ducoudray & Christophe Alliel, Les chiens de Pripyat — t.2 : “Les enfants de l’atome”

Les orphe­lins de Tchernobyl…

En Ukraine, quelques mois après l’explosion de Tcher­no­byl, des groupes de chas­seurs sont consti­tués pour abattre les ani­maux errants irra­diés. Kolia, un jeune gar­çon suit son père dans ces bat­tues. Pravda, un ancien de l’armée rouge, veut mettre à son tableau de chasse un grand chien noir insai­sis­sable qui a appelé Le roi des chiens.
Kolia découvre dans une église un pas­sage qui l’amène au cœur de la cen­trale. Il est accueilli par un groupe d’enfants.

Le second volet du dip­tyque s’ouvre sur le grand chien noir avec, en car­touche, des vers de L’Apocalypse sur fond d’une cen­trale en per­di­tion. Kolia est inté­gré dans le groupe des enfants. Ceux-ci s’amusent à plon­ger dans la cuve de refroi­dis­se­ment pour aller voir le robot, enfin ce qu’il en reste.
Alors que Pravda est téta­nisé sur la remorque rem­plie des têtes de chien abat­tus, les enfants se décident à sor­tir pour se ravi­tailler. Ils se rendent compte qu’une fois encore, ils ont été aban­don­nés. Sur le cadavre d’un homme, ils pré­lèvent une liasse de billets.
Le père de Kolia, est trahi par un de ses aco­lytes et fait pri­son­nier par un groupe de chas­seurs concur­rents. Mais le prix payé par les auto­ri­tés pour un gamin est bien plus élevé que celui d’un chien. Comme cer­tains sont prêt à tout pour de l’argent…

Sur les pas de Kolia, Auré­lien Ducou­dray dépeint la vie de ceux qui sont res­tés dans, ou à proxi­mité, de Tcher­no­byl. Il réa­lise, avec son dip­tyque, un repor­tage sur les condi­tions d’existence de ceux qui, volon­tai­re­ment ou non, sont res­tés dans le péri­mètre de la cen­trale. Cette zone, encore for­te­ment conta­mi­née, offre cepen­dant un “refuge” à ceux qui fuient les guerres, les crises. Ils peuvent y trou­ver une exis­tence plus pai­sible.
Dans ce second tome, le scé­na­riste porte son atten­tion sur des enfants vivants dans les décombres de la cen­trale, des enfants aban­don­nés depuis la catas­trophe pour de mul­tiples rai­sons. Ils sur­vivent mal­gré les mal­for­ma­tions, les mala­dies liées aux irra­dia­tions. Ils se sont regrou­pés autour d’une jeune ado­les­cente. Mais, s’ils connaissent des com­bines pour sub­sis­ter, ils res­tent, mal­gré tout, des enfants incons­cients des risques.

Le repor­tage fait place aussi à une belle intrigue et une savou­reuse his­toire entre ces enfants pour­chas­sés et ces chiens tra­qués. Le scé­na­riste met en scène une gale­rie de chas­seurs, des indi­vi­dus aux sen­ti­ments équi­voques, accep­tant de tuer les chiens errants, mais refu­sant de perdre celui, ou ceux, qui leur sert de com­pa­gnon. Il déve­loppe aussi l’émotion avec une scène où deux gar­çon­nets paient une pros­ti­tuée pour qu’elle leur lise une his­toire et les presse contre elle comme le fait une mère.
Chris­tophe Alliel, avec son des­sin semi-réaliste, donne vie à un ensemble de per­son­nages expres­sifs, dans toute la gamme des sen­ti­ments, allant de l’amour à la haine. Il plante des décors mena­çants, fait vivre ces lieux en ruines de façon fort réus­sie. Magali Paillat apporte, avec sa mise en cou­leurs, une réelle plus-value à cette atmo­sphère lourde, angoissante.

Les Chiens de Pri­pyat se lit avec un grand inté­rêt, tant pour l’intrigue, la gale­rie des per­son­nages, le regard porté sur une popu­la­tion sacri­fiée, que pour le gra­phisme attractif.

serge per­raud

Auré­lien Ducou­dray (scé­na­rio), Chris­tophe Alliel (des­sin) & Magali Paillat (cou­leurs), Les Chiens de Pri­pyat — t.2 : Les enfants de l’atome, Bam­boo, coll. Grand Angle, jan­vier 2018, 56 p. – 14,50 €.

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