Alain Helissen s’amuse. Il offre dans son livre mixte une danse des images (collages papier et gouaches) et des mots. Et qu’importe si ces derniers ratent leur cible. L’auteur le sait et le précise : « mes mots sont inaptes à résonner en vous », et d’ajouter « Vers où cours les mots ? Verrou ». Mais qu’importe : la poésie est un jeu avec le je, avec le nous. Et si la vie est un leurre la poésie ne se veut pas toujours du Shakespeare. Helissen se contente d’entrer dans le non stratifié à la fois de la disjonction et de la jonction du voir et du parler.
Dans ce cahier de dessin et de poésie, l’énonçable se mêle au visible sans chercher à nous renvoyer à nos gouffres intérieurs. L’oeuvre n’a pour but que de désencoigner un peu la crevasse du silence dans un travail d’ironie et de dérision loin de toute prétention ou snobisme. Il s’agit d’un simple exercice de respiration, une parenthèse ludique, une avant-scène et un arrière-pays dans lequel le livre avance à son rythme.
Ce qui n’empêche pas à Helissen de rappeler que les poètes poursuivent une proie imaginaire afin de savoir ce qu’il est en est du monde, des autres et d’eux-mêmes. Par l’effet de « bande dessinée » et de « carnet d’artiste », la poésie reste une présence familière : le verbe nous y accompagne comme il peut.
jean-paul gavard-perret
Alain Helissen, Miniatures, chez l’auteur, 2018.