A la recherche de la poésie pure
Cherchant une poésie pure, Colette Prévost sait que pour l’atteindre il faut se prêter à toutes les formes. Les vers ne sont pas forcément sa clef. Pour l’ouvrir et la retenir, il faut parfois la laisser couler en ce qui ressemble à une narration et un récit. Mais l’auteure profite de leurs fissures. Sans pour autant se perdre « dans les méandres d’une parole vaine ». La poétesse sait à la fois se fondre dans les sensations multiples et les restituer dans la quête de la chaleur et la caresse. Les deux se mêlent en de multiples « sons » car il existe de la musique en toutes choses.
Le temps et la paysage restent néanmoins centraux dans ce Livre d’Heures où transparaît le sentiment de la perte au sein d’instants fragiles comme si, au moment où les feuilles tombent, elles s’amassaient pour se recouvrir les unes les autres. Cette magie tient à la lumière de rencontres qui elles-mêmes nourrissent divers sentiments. L’homme y rôde de manière impressive. Colette Prévost l’évoque, le suggère et contre l’altération du temps elle se soumet implicitement à sa séduction. En retour, écrire permet de lui faire du charme car il demeure une pente ou un penchant doux et intime.
Certes, il est loin d’envahir le poème, le magnétisme vital tient aussi à d’autres éléments pour qui cherche à se comprendre et comprendre le visible et l’invisible dans les marges du silence. Dès lors, l’œuvre ressemble à un conte : les choses vues et les spectacles du monde deviennent un paysage intérieur par la méditation que la poétesse propose. Passant par la porte des apparences et la franchissant, elle est possédée par le songe dans ses profondeurs car chez elle celui-ci n’a rien de creux, de vide.
La poésie le réalise. Et soudain le monde et ses grognements sourds bougent. Et ce, tant que la lumière est là. Et qu’importent les couleurs : flagrantes sous le soleil puis bleuâtres et blanches sous la lune. Car lorsque l’ombre tombe, chez Colette Prévost, elle est toujours accompagnée de la lumière. Manière aussi décaler les sarcasmes du temps ou pour le transpercer afin d’être encore plus vivante et régénérée.
Preuve que la « vieillesse » sans être une simple invention de sornettes peut se trouver cernée dans l’élan le plus fort. Il suffit d’y mêler esprit, cœur, corps et matière.
jean-paul gavard-perret
Colette Prévost , Livre d’Heures, éditions Fondencre, Sagnat, 2018, 120 p. — 16,00 €.