Les cavales toutes en finesse d’Alison Bignon font jaillir des profondeurs cachées. L’inconscient y fait surface : il possède forcément des obscurités mais aussi beaucoup de lumière. Une telle approche est rare. Elle soulève quelques problèmes fondamentaux auxquels l’artiste ne donne pas forcément de réponse. Mais ses cristallisations insidieuses et poétiques évitent tous les procédés de style.
Les formes semblent toujours fraîches et naissantes en dépit de certaines “larmes” ou coulures, entre circulation et immobilité. Les oeuvres offrent un réel qui se prononce avant la parole dans la volonté de rejoindre l’ouvert et d’annuler l’angoisse. L’image semble presque inexistante mais de manière sensible et sensuelle. Elle porte atteinte à ce tout ou ce rien qui se manifeste après avoir fait le vide.
Chaque peinture est vrillée par le vertige et engage toujours une fragilité gracile. Si bien que demeurer au plus près, c’est tout juste être tenu par une telle présence. Une délicatesse extrême crée l’apparition au moment où le regard est porté à l’abîme et à la résurgence dans la clarté d’un monde inconnu, à voir sans limite, là où tout est suspendu.
Les jointures se dissolvent en une liberté : le monde semble accessible, réparable par de telles présences au devant de quoi ou de qui nous sommes.
jean-paul gavard-perret
Alison Bignon, Tendre et Cruel, chez l’artiste : https://www.alisonbignon.com/