Knud Viktor, Concert quadriphonique, images et courts métrages

Les sons igno­rés de la nature

La Mai­son du Dane­mark per­met la recon­nais­sance (bien tar­dive en France) de celui que Jean-Claude Roché depuis le Lubé­ron tenta de défendre et d’illustrer en pro­dui­sant plu­sieurs albums sonores dans les années 70. Knud Vik­tor (1924–2013) reste un maître du « field-recording » et pré­cur­seur de l’écologie sonore. Il est aussi une figure majeure de l’avant-garde de la « pein­ture sonore ». Peintre à l’origine, formé à l’école des beaux-arts à Copen­hague, il s’installa dans le Lubé­ron au début des années 1960 pour peindre la lumière qui avait fas­ciné Van Gogh. Mais en décou­vrant l’influence de la lumière sur le chant des cigales, il devint peintre sonore et passa sa vie à enre­gis­trer une constel­la­tion des sons de la nature. Il enre­gis­tra par­fois en brut et sou­vent en les retra­vaillant sans cesse selon divers stra­ta­gèmes et bri­co­lages pour sai­sir des sons insoup­çon­nés: bruits des gouttes d’eau, vie des insectes, rêves du lapin dans son ter­rier, échos de la mon­tagne.
Pris par les sons de la nature, les sai­sis­sant de nuits car ils sont plus sen­sibles, Knud Vik­tor sor­tait de sa ber­ge­rie pour écou­ter le bruit des feuilles, des cailloux comme celui d’un escar­got qui marche, du ver dans la pomme qui gratte, bref l’infiniment petit que l’on n’entend pas : « dans une pomme, il y a un vers qui gratte, disait-il, et on entend le jus de la pomme et on a l’impression que le vers se régale » écrivait-il. Dès lors, au moment où toute une vie dis­pa­raît, l’oeuvre prend encore plus de sens. L’artiste devint l’explorateur minu­tieux et le poète d’un ter­ri­toire dont il ne sor­tira que très rare­ment afin d’inventer des « images sonores » en quadriphonie.

Knud Vik­tor demeura clair sur ses objec­tifs : « Je ne pré­tends pas que ce que je fais est de la musique. Je l’ai tou­jours pensé comme une conti­nua­tion de la pein­ture. » Knud Vik­tor fut non seule­ment com­po­si­teur mais vidéaste et un des pre­miers geeks. Son œuvre, si elle reçut un suc­cès cri­tique demeura mécon­nue, même s’il fut sol­li­cité (trop briè­ve­ment) par France Musique. Il réa­lisa des vidéos et deux courts métrages dont Bulles (pro­jeté en avant-première du film La mariée était en noir de Fran­çois Truf­faut en hom­mage au père de Jean-Claude Roché et auteur de Jules et Jim). L’exposition a été conçue à Digne-les-Bains par le col­lec­tif Nigh­tOwl avec la col­la­bo­ra­tion de l’association Allo La Terre, du Cairn-Centre d’art et du Musée Gas­sendi à Digne-les-Bains où sont conser­vées depuis 2013 les archives Knud Vik­tor sous la bien­veillante atten­tion de son fils.
jean-paul gavard-perret

De Knud Viktor ,

-  Images (L’Oiseau Musi­cien, 1972),
- Ambiances (L’Oiseau Musi­cien, 1972),
- Les tuyaux de Petit Pot, pour un texte de Jean-Paul Gavard-Perret (L’Oiseau Musi­cien, 1973).

Expo­si­tion actuelle :  Knud Vik­tor, Mai­son du Dane­mark, Paris, à par­tir du 26 jan­vier 2018.

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