En 1037, dans le thème d’Anatolikon, un homme est marqué au fer rouge.
En 1040, sur une côte de Sicile, Tancrède, à la tête d’une vingtaine de mercenaires, vient proposer ses services au seigneur Harald. Il est accompagné d’Étienne, un diacre, légat du pape. Harald doit prendre la cité de Taormine pour permettre à l’armée bizantine de poursuivre la conquête de l’île. Or, cette cité résiste. Tancrède se fait fort de la réduire en trois jours. Mais Harald veut le mettre à l’épreuve et le missionne pour débarrasser la contrée d’une bande cavaliers arabes qui ne cesse de harceler ses troupes.
Arduin, l’émissaire du roi Lombard, veut assurer sa suprématie sur les troupes présentes et voit d’un très mauvais œil l’arrivée de ce nouveau guerrier que rien ne semble effrayer. Mais qui est Tancrède, cet homme qu’Étienne appelle Robert, que la maitresse d’Harald, la sœur du Strategos Maniakès définit comme un homme qui a traversé les enfers… et qui a survécu ?
Le scénariste se passionne pour l’histoire de l’époque médiévale. Après le Paris du XIIe siècle dans Le Roy des ribauds (Akileos), il s’attache à la pointe sud de ce qui deviendra l’Italie, avec cette Sicile qui fut l’objet de tant de convoitises au début du second millénaire. Cette île stratégique passa sous le joug de différents conquérants avant de devenir une partie de l’empire musulman. Cette occupation, par l’émir de Palerme, est fragile, situation qui pousse le Basileus Michel IV à entreprendre sa conquête pour l’amener dans le giron de Byzance. À cette période, nombre de Normands sont dans la région en quête de survie à défaut de fortune. Cette présence amènera, d’ailleurs, la constitution du Royaume normand de Sicile presque un siècle plus tard.
C’est dans ce cadre historique authentique que Vincent Brugeas place son intrigue centrée sur l’étrange couple que forme Tancrède et Étienne, ce diacre insensible à la souffrance. Le premier est, sans conteste, un chef de guerre chevronné qui semble, cependant, entretenir avec le second des liens forts et hiérarchiques qui restent inconnus. Il entoure ce duo de personnages hauts en couleur, aux motivations et ambitions divergentes.
Avec cette matière historique et un peu de fiction, le scénariste déploie un récit d’aventures épiques avec batailles, combats, luttes fratricides, complots, alliances de circonstance… Prévu en deux tomes, ce récit montre la complexité de ce monde méditerranéen avec la diversité des peuples engagés dans ces combats, les bras de fer entre empires, la recherche de richesses pour soutenir des ambitions, pour asseoir un pouvoir.
La mise en images est confiée à Ronan Toulhoat. Il propose un dessin dynamique relayant bien toute la violence induite du scénario, de ces combats. Le rendu des batailles, des nombreux affrontements entre protagonistes est superbe. Toutefois, le trait dynamique, l’encrage puissant ne permettent pas toujours de bien identifier les personnages.
Ce premier tome, d’un premier cycle, est attractif au possible par la richesse de son scénario, la mise en scène d’un suspense entretenu avec art.
regarder le trailer de l ‘album
serge perraud
Vincent Brugeas (scénario), Ronan Toulhoat (dessin et couleurs) & Rémy Pennarun (aplats de couleur), Ira Dei — t.1 : L’Or des Caïds, Dargaud, janvier 2018, 64 p. – 13,99 €.