Une admirable saga historique
Avec ce nouvel album, Jean Dufaux propose un récit toujours aussi riche en détails historiques et faits authentifiés tirés de documents dont la teneur n’est pas remise en cause. C’est avec cette matière première, fruit d’un solide travail de recherches, que l’imagination de l’auteur se déchaîne pour rendre une histoire épique et d’une grande intensité dramatique.
La fête bat son plein chez Trimalchion, une fête où tout est permis. César en personne honore cette nuit accompagné de Ruffalo, le centurion de sa garde prétorienne. Dehors, deux individus un bossu et un colosse, attendent un certain Lucius Murena pour lui briser le cou. Celui-ci est chez Trimalchion en compagnie de Pétrone. La rencontre avec César est à haut risque compte-tenu des derniers événements. Cependant, quelques minutes plus tard, Néron accepte les explications et se réjouit de retrouver son ami avec qui il s’affiche pour montrer son retour en grâce.
C’est en quittant la fête que Lucius est sauvagement agressé par les deux individus qui l’attendaient. S’il réussit à vaincre le colosse, il reste gravement blessé sur le sol. La sœur de Pison, qui arrive quelques temps plus tard sur les lieux, décide de faire reculer Hadès devant ce beau garçon. Mais, s’il recouvre la santé grâce aux soins prodigués par la jeune femme, il est amnésique.
Or, Pison, avec la complicité de Scaevinius et de quelques notables, fomente un complot contre Néron car ce dernier, avec ses folles idées de grandeur pour reconstruire Rome, veut puiser dans les fortunes des plus riches…
Lucius Murena continue son chemin chaotique dans une Rome sous la coupe de Néron. Jean Dufaux éclaire, dans cet album, un des complots contre le tyran et les conséquences induites. Alors que son héros vient de retrouver les faveurs de César, une perte de mémoire et le fait de se retrouver sans le vouloir, sans le savoir, dans l’antre d’un comploteur, le place dans une nouvelle situation ambiguë.
Jean Dufaux excelle dans l’art de tirer de faits bruts un récit cohérent riche en péripéties. On retrouve dans cette série quelques-uns des grands thèmes fondateurs de son œuvre tels que le pouvoir, la folie ou la folie du pouvoir, la solitude dans de nombreuses déclinaisons. Et avec Murena, il a trouvé matière à les mettre en scène de façon remarquable.
Pour ce dixième album, c’est Theo Caneschi qui assure un dessin splendide. Il partait, cependant, avec un lourd handicap car succéder à Philippe Delaby, dans la catégorie du dessin réaliste, n’est pas donné à tout le monde. Mais Theo a une carte de visite fort riche. N’a-t-il pas intégré Inklink, un atelier florentin réputé ? Pour Delcourt, il réalise Le Trône d’argile et Le Pape terrible.
Avec Le Banquet, les lecteurs peuvent retrouver avec un grand plaisir la suite des aventures d’un héros superbe, mises en images de séduisante façon.
serge perraud
Jean Dufaux (scénario) & Theo (dessin), Lorenzo Pieri (couleurs), Murena – t.10 : Le Banquet, Dargaud, novembre 2017, 72 p. – 11,99 €.