Un très agréable moment de distraction
Avec Lanfeust, son antihéros préféré, Christophe Arleston sur un ton léger, plein d’humour, de remarques cocasses, s’autorise l’imagination la plus débridée dans des intrigues maîtrisées où règnent l’action, le mouvement et la magie. Avec ce personnage, entouré d’un petit groupe de protagonistes singuliers, il a développé nombre de séries, empruntant sans vergogne à d’autres œuvres, puisant dans la richesse de la culture populaire pour se les approprier et les plier à ses exigences narratives. Après la série mère, il fait paraître Lanfeust des étoiles qui lorgne vers le space opera et la présente série qui s’inspire de mythologies avec Lylth. Celle-ci, issue des mythes de la création, est présentée comme une dévoreuse de mondes et met donc en péril l’univers de Troy.
Au Castel Or-Azur, tout le monde s’active à préparer la banclette pour fêter la victoire. La banclette est une institution mise en place par Hangouphre-le-Vorace qui était très fier d’avoir associé, en tant que promoteur du fromage sous toutes ses formes, banquet et raclette. Mais Lanfeust n’a pas la tête à la fête. Si l’armée de Lylth a été vaincue, la démone cours toujours. Lanfeust voudrait profiter de son affaiblissement pour la mettre hors d’état de nuire définitivement.
À cet instant la Porte des Étoiles laisse entrer Glin, le fils de la princesse Cixi avec Napo. La bestiole révèle que des satellites de surveillance ont détecté plusieurs ouvertures d’une autre porte. Les enfants, qui ne tiennent pas à table, jouent aux alentours. Ils repèrent une étrange fillette bleue. Celle-ci, après s’être nourrie de l’énergie d’un écureuil, se précipite vers la cosse de la reine Banshee. Malgré l’intervention rapide des adultes, ceux-ci ne peuvent empêcher Lylth de se gaver d’énergie, de se transformer en Banshée et de se multiplier. C’est par centaines qu’elles envahissent le monde…
Autour des personnages fondateurs de la saga, le scénariste crée une foule de nouveaux intervenants comme, par exemple, Flarpaite, l’apprentie-mage qui sait tout sur tout et saoule tout le monde. De l’humour, encore de l’humour, toujours de l’humour est le maître mot de l’auteur. Il livre des situations truculentes, des réparties et des dialogues pétillants, des remarques et annotations décalées. Un jeu consiste à rester très attentif pour traquer les différents emprunts. Ainsi, il adapte, pour un Lanfeust en colère, la célèbre tirade de Bernard Blier dans Les Tontons Flingueurs. L’idée de transformer, pour un peuple, le héros en dieu avec toute la religion qui va avec est amusante au possible, d’autant qu’Arleston pointe toutes les inepties que peuvent véhiculer les religions.
Didier Tarquin, toujours fidèle au poste, toujours fidèle à lui-même, sert un dessin superbe tant pour les personnages que pour les décors. Il sait jouer avec la dynamique des actions, avec les « extravagances » du scénario pour un bestiaire et une flore inventive magnifiés par son goût du détail surprenant. La mise en couleurs assurée de Lyse, son épouse, renforce l’atmosphère générée par le dessin et le scénario.
Ce neuvième tome, sur onze prévus, est un bel album avec lequel on passe un très agréable moment de distraction.
serge perraud
Christophe Arleston (scénario), Didier Tarquin (dessin) & Lyse (couleurs), Lanfeust Odyssey — t.9 : Le Stratège ingénu, Soleil, coll. Lanfeust – Univers de Troy, novembre 2017, 48 p. – 14,50 €.