Répulsion et fascination des images
On se souvient de la phrase de Winnie dans Oh les beaux jours : “Assez les images”. Cet appel, Michaux le réitère afin que l’image devienne non seulement une ombre passagère mais pour qu’elle se réduise dans son imaginaire provisoirement déréglé. L’artiste crée « Ignorant, inconscient pour avoir avalé cette drogue, en somme quasi pour m’en débarrasser ». Sensible à l’étroite parenté qui relie son interrogation fondamentale à la réflexion sur l’image et la pensée, l’artiste a créé des œuvre devenues classiques.
L’exposition présente une douzaine de ses œuvres sur papier réalisées autour des années 70. Y transparaissent à la fois l’émergence et l’effacement d’une figuration humaine.. De telles ombres semblent passagères. Elles sont réalisés à l’encre de manière rapide comme si Michaux voulait en capter le mouvement en faisant confiance à ce que Lacan a bien mis en évidence : toute image fonctionne comme un “piège à regard”. Au moment où l’artiste explore certains « misérables miracles », ces êtres semblent agités de vibration et se déplacer d’une œuvre vers une autre.
La représentation plastique de la sorte évite tout arrêt ou cul-de-sac au moment où l’image devient celle de presque personne. Seule cette image “idéale” peut atteindre ce qu’il cherche sans cesse, à savoir l’extinction de toute visibilité et plus particulièrement la suppression et l’anéantissement du monde.
Michaux parvient à proximité de la disparition dans laquelle la négation n’exprime plus rien de négatif mais dégage simplement l’exprimable pur.
jean-paul gavard-perret
Henri Michaux, Figures, Galerie Lelong and Co, 13 rue de Téhéran 75008 France, du 25 janvier au 10 mars 2018.