Jean Echenoz. Roman Rotor Stator (Exposition)

Pour­suite du mou­ve­ment et « dura­tion » des thèmes

Prix Médi­cis et Gon­court, Jean Eche­noz « expose» ses 13 romans de vol­ti­geur à Beau­bourg. Roman Rotor Sta­tor (les deux der­niers mots du titre sont tirés du Méri­dien de Green­wich, pre­mier roman de l’auteur) pré­sente une machi­ne­rie roma­nesque motrice. C’est un parti pris visuel pour mon­trer la récur­si­vité du lan­gage avec ses suites d’escaliers ou de jeux où le nar­ra­teur se perd (cf. « Je m’en vais »).
Se docu­men­tant beau­coup pour ses romans mais ne s’éternisant pas, l’auteur décolle ensuite des régions pre­mières et leurs élé­ments pour offrir un uni­vers presque fil­mique et un jeu contre soi-même. Une telle expo­si­tion ne peut le sai­sir mais néan­moins les « images » tentent de dire ce que les mots font dans leurs enclaves et leurs narrations.

Comme Eche­noz jouant avec les formes lit­té­raire (polar, bio­gra­phie, etc.), l’exposition pro­pose — à tra­vers manus­crits ori­gi­naux, story-boards fiches, extraits de film, lec­ture de Cadiot — un éven­tail de formes et de champs où l’œuvre danse ou pagaie. Le pro­jet n’était pas évident mais il est par­fai­te­ment abouti en cette gémel­lité texte/image.
Les docu­ments ne sont pas une simple repro­duc­tion ou illus­tra­tion : l’ensemble d’une telle pla­te­forme prend un carac­tère fan­tas­ma­go­rique. Ce trans­fert méta­mor­phose la vision de l’œuvre en évi­tant le risque de la paro­die. Elle res­ti­tue l’aspect inex­tri­cable d’un tra­vail où se retrouvent autant le Flau­bert de  Bou­vard et Pécu­chet  que les Des­chiens. L’œuvre en effet peut se lire et se voir comme un drame et une farce. Comme dans son der­nier  Envoyé spé­cial  et sa Creuse.

La « beauté » est tou­jours brute et iro­nique pour créer un étrange effet de ver­tige entre ce qui est dit et les reli­quats du réel. Impli­ci­te­ment, l’ombre de Jérôme Lin­don plane. Il fut non seule­ment l’éditeur mais le guide d’Echenoz en lui évi­tant hia­tus et déra­pages mais de manière par­ti­cu­lière : Lin­don refusa d’être un père sub­sti­tu­tion à l’écoute des états d’âme. Il pré­féra ren­voyer l’auteur au face à face avec lui-même.

jean-paul gavard-perret

 Jean Eche­noz. Roman Rotor Sta­tor, Expo­si­tion. B.P.I. Centre Pom­pi­dou, Paris, du 29 novembre 2017 au 5 mars 2018.

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