Pour en finir avec le jugement de dieu
Marie-Lare Dagoit a sélectionné et réuni des photos d’un temps où tout restait à faire ou à défaire. Elle signe également un texte qui flèche l’ensemble : « Et ma langue lèche embaumée. / Mais quand, entre tes cuisses, ramassées, / Je viens te régaler tout bas, /Crains-tu que je ne t’embrasse pas ? ». Le lesbianisme (puisque c’est bien le sujet) était chez le commun des mortels à peine une idée. Il rampait mais la scène culturelle l’ignorait sinon lorsqu’elle était parallèle. Nos penseurs phares firent sur le sujet une belle impasse, écrivaines et artistes lesbiennes avançaient masquées.
A leur manière, de telles images étaient subversives. Ceux qui les voyaient les recevaient avec ricanement, cynisme voire comme armes de destruction massive des mœurs. Le lesbianisme pourtant existait et pas forcément chez les « camionneuses ». C’est pourquoi Marie-Laure Dagoit a le mérite de révéler des images où se dégagent une spontanéité, une simplicité que l’omniprésence médiatique a peut-être et à force pourrie.
L’auteure ramène à la subversion « souvereine ». Elle permit l’évasion, le rêve, l’utopie, un théâtre inconnu, un jaillissement sans limite de la vie pour des femmes que la morale condamnait au nom de ses manigances, hypocrisies, bienséances. Il arrivait qu’elles ignoraient leur vérité tant elle était cachée. Le kitsch des affiches, la langueur des photos d’art, la brutalité de celles de reportage permettent de désenclaver une vie cachée pour — et comme disait Artaud « en finir avec le jugement de Dieu.»
jean-paul gavard-perret
Marie-Laure Dagoit, embrasse-moi idiote, Editions littérature mineure, Rouen, 2017, coffret 5 livres — 25,00 €.
Et la tolérance bordel !
Bravo à JPGP qui rappelle si bien la phrase d’Artaud “en finir avec le jugement de Dieu.”