Nous rendons régulièrement compte des avancées de la recherche historique sur les guerres et sur le génocide de Vendée, véritable matrice de toutes les horreurs du XXe siècle. La plupart de ces travaux ne se diffuse hélas ! que fort peu dans le grand public. On ne peut que se féliciter qu’un historien aussi médiatique que Patrick Buisson et qu’un grand éditeur comme Perrin proposent un livre capable de toucher un large public grâce à la richesse de son texte et à la beauté de ses illustrations.
Le récit est accompagné d’extraits de livres parfois anciens mais bien documentés, de témoignages bouleversants, d’œuvres littéraires majeures et d’archives historiques dont les plus percutantes sont les propres textes des révolutionnaires (dirigeants politiques et militaires) qui ont mis en œuvre le génocide… et ne s’en cachent pas !
Car Patrick Buisson ne s’embarrasse de circonvolutions et nomme l’évènement avec le seul nom qui lui convient : un génocide suivi d’un mémoricide, le tout prouvé par Reynald Secher, confirmé par le juriste Jacques Villemain et encore aujourd’hui victime d’une sorte de « négationnisme partiel » qui ne veut pas dire son nom.
Toutes les grandes étapes des guerres de Vendée sont passées au crible de l’analyse, depuis les victoires du printemps 1793 jusqu’aux défaites de l’automne, avant que les colonnes infernales de Turreau ne ratissent le pays. On suit pas à pas ces paysans qui, parce que la Révolution les priva de Dieu, de leur roi et même de leurs fils envoyés à la guerre, se soulevèrent. Ils cherchèrent des chefs qui ne manquèrent ni d’héroïsme, ni même de sainteté. Mais ni les uns ni les autres n’étaient de taille à lutter contre une armée bien entraînée et bien équipée, munie d’ordres d’extermination implacables. La gloire fut bien souvent au rendez-vous mais pas la victoire.
Les révolutionnaires eurent donc raison des paysans à qui ils ôtèrent toute humanité et qu’ils massacrèrent « par principe d’humanité ». Comme vient de le montrer Stéphane Courtois dans sa très belle biographie de Lénine, l’épisode de la Vendée revenait comme un leitmotiv chez le chef bolchévique qui y puisa l’inspiration pour écraser la contre-révolution. Soljenitsyne ne s’y trompa pas non plus lorsqu’il vint sur les lieux même d’un génocide qui annonçait ceux du communisme et du nazisme.
« Ce qui constitue une République, c’est la destruction totale de ce qui lui est opposé » avait dit Saint-Just. Le programme fut appliqué à la lettre. Ce très beau livre, préfacé par Philippe de Villiers, le prouve.
frederic le moal
Patrick Buisson, La grande histoire des guerres de Vendée, préface de Philippe de Villiers, Perrin, novembre 2017, 268 p. — 29,00 €.