Jean-David Morvan & Rey Macutay, Ravage — t. 2/3

Quand l’énergie vint à manquer !

Pour mieux sai­sir ce que le roman­cier et le scé­na­riste mettent en scène, il faut ima­gi­ner notre société bru­ta­le­ment pri­vée du magné­tisme. Toute la civi­li­sa­tion qui uti­lise les capa­ci­tés de l’informatique, et toutes ses appli­ca­tions, n’aurait plus aucun moyen. Les actions basiques, quo­ti­diennes devien­draient impos­sibles à réa­li­ser car, par exemple, le fonc­tion­ne­ment des cen­trales nucléaires, ther­miques, la dis­tri­bu­tion de l’électricité sont com­man­dés via des cal­cu­la­teurs.
La dis­pa­ri­tion bru­tale de l’électricité entraîne toute une série de catas­trophes sur Paris et peut-être sur toute la pla­nète. La Ville d’or, ce fabu­leux immeuble sym­bole du pro­grès tech­no­lo­gique, de la vic­toire de la tech­nique sur la nature, sombre dans le chaos. De plus, un avion, sans guide par la carence de la tour de contrôle, vient le per­cu­ter sous les yeux de Fran­çois en route pour retrou­ver Blanche. Il réus­sit, à contre-courant, à mon­ter à l’étage où elle se trouve. Il se col­lette avec Jérôme Seita, le pro­duc­teur de musiques de la jeune femme qui pro­pose à Blanche de par­tir avec lui. Son jet privé l’attend sur la ter­rasse. Blanche choi­sit de par­tir avec Fran­çois. Dans une ville en ruines, la loi de la jungle s’est ins­tal­lée immé­dia­te­ment. Fran­çois veut fuir ce champ de décombres, mais seul et sans moyens, peut-il réus­sir ?
L’action se déporte de la catas­trophe vers une période située quelques décen­nies plus tard quand le Patriarche est confronté au retour de la tech­no­lo­gie avec la construc­tion d’un cha­riot mû par la vapeur, une idée qui a germé en voyant le cou­vercle d’une mar­mite sou­le­vée par l’émanation de l’eau bouillante.

Avec ce thème, René Bar­ja­vel jetait en son temps un pavé dans le débat qui se ren­force aujourd’hui entre les tenants d’un usage immo­déré de la tech­no­lo­gie entraî­nant cepen­dant un appau­vris­se­ment des res­sources ter­restres et ceux qui tiennent pour une meilleure ges­tion de ces res­sources en allant vers des éner­gies renou­ve­lables et moins pol­luantes. Son roman mon­trait un jusqu’auboutisme, une pénu­rie sou­daine, puis un retour obligé, mais pas sans casse, aux outils natu­rels pri­vi­lé­giant la par­ti­ci­pa­tion active de l’être humain. L’époque de son écri­ture était dans cette mou­vance, ren­for­cée par la situa­tion des Fran­çais qui, dans un pays occupé par les nazis, man­quaient de tout.

Jean-David Mor­van apporte sa touche et en fait une relec­ture plus en lien avec la société de ce début du XXIe siècle. Il expli­cite, par exemple, dans un bel échange entre Fran­çois et Jérôme Seita les argu­ments pour et contre le pro­grès, ses avan­tages et ses incon­vé­nients. Rey Macu­tay mul­ti­plie les actions mus­clées, les bagarres, les batailles ran­gées, les scènes de panique, les des­truc­tions d’immeubles, d’avions, de voi­tures, d’humains… S’il “récu­père” dans la pre­mière planche une célèbre scène, il fait preuve d’une belle ima­gi­na­tion pour la suite.
Jean-David Mor­van signe là une adap­ta­tion réus­sie du roman, pri­vi­lé­giant, avec l’emploi de l’image, les scènes spec­ta­cu­laires et don­nant un ton plus moderne à l’intrigue.

lire les pre­mières pages

serge per­raud

Jean-David Mor­van (scé­na­rio d’après un roman de René Bar­ja­vel), Rey Macu­tay (des­sin), Wal­ter (cou­leurs), Ravage - t. 2/3, Glé­nat, coll. “Gra­fica”, octobre 2017, 48 p.- 13,90 €.

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