Diane Kanbalz, La disparue du Venezuela

Un dépay­se­ment garanti 

Le récit, libre­ment ins­piré de faits réels, se déroule entre Cara­cas et Merida, une ville située près de la fron­tière colom­bienne. L’auteure dresse un état du pays qui ne donne pas envie d’aller y faire du tou­risme. Elle décrit la misère, la cor­rup­tion, la cri­mi­na­lité qui explose, orga­ni­sée à grande échelle et pra­ti­que­ment en toute impu­nité. Elle appuie son intrigue sur un enlè­ve­ment, celui d’une jeune Fran­çaise récem­ment arri­vée dans le pays. Elle déroule la pra­tique cou­rante, quasi quo­ti­dienne, de l’enlèvement, le ban­di­tisme qui sévit à des niveaux hima­layens.
Avec pour héros, un poli­cier qui a subi une grave cas­sure et qui tente de sur­vivre, D. Kan­blaz fait vivre le tra­vail des négo­cia­teurs, les approches vis-à-vis des ravis­seurs, les tech­niques employées, la col­lecte des infor­ma­tions pour tout connaître de la vie de la famille, la façon dont ils s’en servent, le trai­te­ment phy­sique et psy­cho­lo­gique de la négociation.

Le capi­taine de police Phi­lippe Lar­cœur est, à sa demande, offi­cier de liai­son déta­ché à l’ambassade de France à Cara­cas, au Vene­zuela. Il traîne une souf­france colos­sale, consi­dère que sa vie est fou­tue mais il fait son bou­lot. Cepen­dant, il refuse une mis­sion car il doit être à Paris dans peu de temps pour l’anniversaire de sa fille.
Cécile Rave­leau a été enle­vée il y a une quin­zaine de jours, sa famille se démène et le Quai d’Orsay se réveille. Il faut inter­ve­nir, ras­su­rer les parents qui viennent d’arriver. L’ambassadeur a obtenu l’envoi immé­diat de deux spé­cia­listes de la négo­cia­tion avec des ravis­seurs et il convainc Phi­lippe d’aller à Mérida, juste le temps de faire la liai­son avant l’arrivée des négo­cia­teurs. Dans deux jours, il pourra reve­nir et prendre son avion. Sur place, il contacte le repré­sen­tant de la police locale, prend quelques repères, obnu­bilé qu’il est par son retour. Il fait connais­sance des parents, de son frère. Cécile tra­vaillait dans le res­tau­rant que ce der­nier avait monté, vivait avec Manuel un ser­veur. Les cir­cons­tances amènent Phi­lippe à se faire pas­ser, au télé­phone, pour le père de Cécile et il obtient ainsi quelques petites avan­cées. Mais il est piégé. Il a pris la place de celui avec qui les ravis­seurs veulent négo­cier. Ceux-ci, main­te­nant, connaissent sa voix. S’il s’en va, ils la tuent…

Décri­vant le fonc­tion­ne­ment d’une pri­son des situa­tions de déten­tion ahu­ris­santes, la roman­cière mène son récit avec maî­trise, sachant jouer avec le sus­pense, créer une ten­sion qui va cres­cendo. Ainsi, au début, elle met la pres­sion sur le départ sans cesse repoussé de Phi­lippe pour rejoindre sa fille, un objec­tif auquel il tient, n’hésitant pas à fran­chir le pas de l’insubordination pour ce faire. Puis, lorsqu’il est piégé, il avance pour libé­rer la cap­tive, met­tant en œuvre ses acquis et réflexes d’enquêteur, fai­sant de cette libé­ra­tion une affaire per­son­nelle, allant au-delà des limites, se met­tant en dan­ger. La roman­cière mul­ti­plie les rebon­dis­se­ments avec une gale­rie de per­son­nages com­po­sée avec soin, aux réac­tions par­fai­te­ment ana­ly­sées.
Le roman est envoû­tant. Il accroche le lec­teur dès les pre­mières pages pour ne plus le lâcher, l’obligeant à tour­ner les pages encore et encore jusqu’à un final éblouissant.

serge per­raud

Diane Kan­balz, La dis­pa­rue du Vene­zuela, édi­tions de l’aube, coll. “Noire”, octobre 2017, 268 p. – 22, 00 €.

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Filed under Pôle noir / Thriller

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