Devenir roi n’est pas de tout repos…
À Thèbes, un homme est enchaîné et des hommes veulent entendre son récit, le récit d’un échec.
C’est la découverte sur le Nil, quelques années auparavant, d’une barque mortuaire remplie de richesse qui a poussé un responsable romain en 737 après la fondation de Rome, à combiner une expédition. Un petit groupe va remonter vers les sources du Nil à la recherche de ce territoire qui recèle tant de richesses. Marcus Livius en prend le commandement. Ils organisent donc secrètement sa désertion et celle de dix de ses hommes, des têtes brûlées, pour s’enfoncer dans des terres inexplorées. Après de multiples aventures dans une nature hostile, ils sont faits prisonniers d’un peuple inconnu. Alors qu’ils vont recouvrer leur liberté, Marcus reçoit une flèche empoisonnée.
Le troisième tome s’ouvre sur le rappel de l’interrogatoire de Marcus et sur son réveil après sa blessure. Publius, un légionnaire, lui raconte ce qui s’est passé depuis sa blessure, sa mort, l’intervention des Umuzimu de la reine, son coma depuis… deux ans. Il lui relate ce que sont devenus ses hommes et la visite quotidienne de la reine à son chevet. Tiberius, qui a su se placer près de la souveraine lui indique que celle-ci a besoin d’un roi, que Marcus pourrait être celui-ci s’il accepte de se prêter au rituel violent qui consacre l’époux de la reine, une épreuve mortelle. Marcus, qui rêve de cette femme depuis qu’il a posé les yeux sur la statuette la représentant, est prêt à tout…
Richard Marazano renoue avec le roman d’aventures dans des lieux considérés comme exotiques, tels ceux de Henry Rider Haggard, le père du fameux Allan Quatermain. Il utilise comme moteurs pour son intrigue, ce qui a toujours poussé l’être humain, à savoir l’appât de la richesse, la prise du pouvoir et… l’amour. Mais, il présente son récit de façon peu habituelle, annonçant dès le début l’échec de l’aventure. Le récit conjugue alors la progression de ce petit groupe disparate, ses découvertes et les dangers multiples auxquels ils doivent faire face, dangers issus de la nature et des hommes.
On retrouve, avec la passion de Marcus, le thème similaire employé, entre autres, par Pierre Benoit dans son superbe roman, L’Atlantide où un homme tombe amoureux d’une reine d’un peuple inconnu bien à l’abri du reste du monde. On peut aussi penser au pitch du film Les 12 salopards avec la constitution du groupe et les conséquences qui s’ensuivront quand des têtes brûlées veulent jouer en solo ou ne pensent qu’à piller des richesses. Cependant, dans ce tome, le scénariste s’attache à approfondir les caractères des principaux acteurs du drame, décrivant leurs réactions lorsqu’ils sont confrontés à la captivité.
Marcelo Frusin, né en Argentine, assure un graphisme dynamique. Il a, pour cela été à bonne école car, après des études d’art, des travaux pour quelques éditeurs de son pays, il entre dans le monde du Comics aux USA avec en particulier DC Comics où il dessine Hellblazer, Loveless, Wolverine… Il réalise des planches toniques aux décors raffinés, jouant avec des masses sombres tant pour les attitudes que dans l’expressivité des protagonistes.
Avec ce troisième tome, la série confirme sa qualité. Le scénario s’étoffe avec la face psychologique des acteurs et le dessin puissant du graphiste.
serge perraud
Richard Marazano (scénario) & Marcelo Frusin (dessin et couleur), L’Expédition, t.3 : Sous les larmes sacrées de Nyabarongo, Dargaud, septembre 2017, 56 p. – 13,99 €.