Entre humour et profondeur abyssale
Emmanuel Moses poursuit son chemin poétique : le réel y est présent . Non tel qu’il est mais métamorphosé sans qu’aucune clé ne soit offerte. Raconteur d’histoires, l’auteur reste un poète narratif d’un genre particulier. Son écriture est imprégnée de vie, de cohues et de bruits. Manière de prendre en sandwich le réel entre poésie et fiction.
Cette “distinction” n’est d’ailleurs pas forcément nécessaire. D’autant que l’auteur aime brouiller les frontières : dieu et les hommes se reconnaissent dans le même caniveau.. La dialectique du loufoque est toujours présente même lorsqu’il s’agit d’aborder l’existence de Dieu afin que la métaphysique bascule dans la pataphysique.
Un temps, dans l’oeuvre, Dieu n’était nulle part : « Sous aucune table, aucune chaise, au fond d’aucun tonneau et pas même aux toilettes des dames… ». Désormais, il piétine « à l’arrêt du tram ».Mais il ne faut rien en conclure. Tant du côté du désespoir que de l’espoir.
Le tout est de tenir avec juste ce qu’il faut de sérieux (mais pas trop) entre humour et profondeur abyssale. Que la vie soit un ratage ne doit pas décourager le quidam. D’autant qu’il a ici de quoi rire avant de redevenir poussière et en retenant celle des cendres qui de toujours tombent sur les créanciers de l’existence.
jean-paul gavard-perret
Emmanuel Moses, Dieu est à l’arrêt du tram, Gallimard, collection Blanche, Paris, 2017 (parution début novembre).