Claudine Brécourt-Villars, Du couvent au bordel — mots du joli monde

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Grâce au livre de Clau­dine Brécourt-Villars s’oublie faci­le­ment que l’homme a été créé à l’image de Dieu. Et bien des res­sources de l’obscénité humaine sont mises à contri­bu­tion par l’auteure pour nous en convaincre. Des lieux saints à ceux de per­di­tions et sous la force de la méta­phore, les corps s’enveniment ou s’enflamment à tra­vers “le hareng, la poule, le per­sil, la Dame blanche”. Exit les conven­tions. Et ce, à tra­vers un lan­gage de faune et de flore que la lin­guis­tique a «sage­ment »( ?) col­la­tionné pour dire l’amour de manière jubi­la­toire et évo­ca­trice.
Les seg­ments roses des espaces noc­turnes trouvent un verbe savant, pré­cieux, drôle pour signi­fier attri­buts et pra­tiques là où voyeu­risme et exhi­bi­tion­nisme sont dépas­sés par le verbe éclai­rant. Le livre est dédié à juste titre à Régine Des­forges. L’auteure nous ramène aux rois de cœur et aux valets à pieds et à celles qui près de Saint Lazare vont telles des ambu­lantes ou déam­bu­la­toires pour déles­ter les bourses de toute nature.

Le monde des pros­ti­tuées et des sou­te­neurs est ici tru­cu­lent mais prouve com­bien celles qu’on nomme filles de joie ou putains sont trai­tées en une espèce d’hybride mi-animale, mi-humaine : d’où leurs noms d’oiseaux , de batra­ciens, voire de larves d’insectes. Les arai­gnées de luxure ou de pis­so­tière offrent la par­faite repré­sen­ta­tion du rejet que sus­citent ces filles. Sans par­ler des « clas­siques » : “chienne, gue­non, truie”. Manière pour le mâle de faire mon­ter sa ten­sion mais en même temps de se punir de ce que la femme lui fait éprou­ver.
Clau­dine Brécourt-Villars en don­nant aussi le sens, l’étymologie, la data­tion des termes qu’elle illustre par des cita­tions montre l’évolution de la condi­tion des pros­ti­tuées dans la société fran­çaise, l’évolution des mœurs et, inévi­ta­ble­ment, celle des femmes. Mais la voie d’accès à la vraie liberté semble tou­jours remi­sée même si les lois en leur faveur ont per­mis de défri­cher le chemin.

jean-paul gavard-perret

Clau­dine Brécourt-Villars,  Du couvent au bor­del — mots du joli monde, La Table Ronde, 2017 — 22,00 €.

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