Roger Lahu, Petit traité du noir sans motocyclette (sauf une in extremis)

Le cave se rebiffe

La moto­cy­clette n’est dans ce livre pré­sen­tée in extre­mis que pour rap­pe­ler à l’homme un adage célèbre. Il en va de son che­val de fer comme de sa com­pagne : « femme et moteur, joie et dou­leur ». Mais l’auteur opte pour la pre­mière. En guise de preuve : sa manière d’œuvrer le noir loin des effeuillages de Mar­gue­rite (Your­ce­nar). Pour autant, le poète ne fait pas dans le gau­lois sinon par les vocables afin de lut­ter contre les caveau­bu­laires.
Certes, la mort est pré­sente sous le noir. Mais sa cou­leur est déviée de sa valeur sym­bo­lique. Ne serait-ce que par les réfé­rences : de Dark Vador à Jim Jar­musch. Comme lui le poète affronte la camarde au simple titre qu’elle nous joue de sacrés tours de cochons. Nous sai­gnant, elle nous réduit en « goret pré-boudin purée pommes ». Pas de quoi pour autant en faire une chou­croute. Et la vieille adap­ta­tion de Johnny Hal­ly­day d’un cou­plet anglo-saxon peut prou­ver que « Black is beau­ti­ful ». Si tou­te­fois nous nous accor­dons le droit de se moquer de la fin qui nous est dévo­lue comme ultime joie de notre genre — en atten­dant, sereins, les prouesses que nous pro­mettent les gou­rous de la Sili­cone Valley.

L’auteur nous rap­pelle que la ter­reur de la mort nous colle à la couenne. Depuis l’enfance, cha­cun craint les ombres et les abîmes. Qui dans sa jeu­nesse n’a pas eu la pétoche de se rendre dans une cave ? Et ce, jusqu’à se rebif­fer. Et ce ne sont pas les assu­rances des adultes qui ont de quoi ras­su­rer. Pour preuve, il suf­fit qu’un grand-père meure pour nous affir­mer qu’il est monté au ciel et non ense­veli dans un tom­beau. Ce qui ne trompe per­sonne sauf bien sûr ceux qui croient que le Para­dis existe dans un autre monde.
Mais pour lut­ter contre l’angoisse, Lahu cherche d’autres argu­ments et sur­tout une poé­sie jouis­sive donc adé­quate. Là où tant de poètes font dans la cou­ronne de glaïeuls pour qui sonne le glas  il pré­fère ger­ber dans les tom­beaux ouverts par irré­vé­rence suprême et zéni­thale. Si bien que de la mort il ne reste même plus que dalles.

jean-paul gavard-perret

Roger Lahu, Petit traité du noir sans moto­cy­clette (sauf une in extre­mis), Edi­tions Les Car­nets du Des­sert de Lune, 2017, 90 p. — 14,00 €.

1 Comment

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One Response to Roger Lahu, Petit traité du noir sans motocyclette (sauf une in extremis)

  1. massot jl

    Bon­jour,
    Merci pour cette note de lec­ture trans­mise par Roger Lahu.
    Je m’en vais la par­ta­ger sur la toile et sur le site des édi­tions avec un ©
    Cor­dia­le­ment
    JL Mas­sot
    édi­tions Les Car­nets du Des­sert de Lune
    www.dessertdelune.be

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