Danilo Dueñas, Réparer la vision (exposition)

Les écarts

Danilo Due­nas réduit le monde au presque au néant. Mais non sans iro­nie. Une iro­nie majeure. Ne demeurent que des enve­loppes comme figures les plus sim­ple­ment sen­so­rielles.
L’artiste pré­sente l’évidence qui jus­ti­fie de conti­nuer d’exister là où pour­tant il n’y a désor­mais (presque) plus de vérité conce­vable. L’œuvre crée une poé­sie par­ti­cu­lière. Elle sur­git de situa­tions aussi limites qu’ordinaires.

Au pro­pos visuel de la connais­sance le Colom­bien oppose le réseau de per­cep­tions d’aspects pour jouir de la beauté qui s’y marque. Une beauté cachée dans le vide, plis selon plis. L’artiste impose ses écueils : manière de faire la nique au réel, d’offrir un contre­point indis­pen­sable à une façon d’habiter l’espace et aussi de dire la pré­ca­rité du réel et des choses.

Les « sculp­tures » de l’artiste deviennent la célé­bra­tion la plus pro­bante de l’architecture puisqu’elles ne com­mé­morent pas mais ajoutent leur “pointe” ou leur ventre. Elles ont donc leur mot à dire et à mon­trer, et ce , non au simple titre de l’ornemental, plaie endé­mique de ce qui s’attache à la sculp­ture.
Dans la frag­men­ta­tion, la stra­ti­fi­ca­tion, l’éclatement que de telles struc­tures engagent sur­git un jeu rare sur l’équilibre et le dés­équi­libre sans quoi la sculp­ture n’est rien.

Une sorte de néces­saire “offrande” est pro­po­sée par l’artiste dans la modes­tie de son approche : il n’impose rien. Le créa­teur joue sur le registre de la majesté et de la pré­ca­rité qui, par le dés­équi­libre ou l’équilibre, donne plus de force à l’ensemble de l’espace archi­tec­tu­ral. La sculp­ture ne se veut plus un simple répit ou repos du regard par rap­port à cet espace.
Elle en devient la trans­gres­sion et la ten­sion en une immer­sion dia­lec­tique. Elle met aussi en évi­dence la repré­sen­ta­tion de la monu­men­ta­li­sa­tion du lieu d’exposition et la pré­ca­rité ou la vanité qui touchent à ce que l’homme construit dans son désir de lais­ser une trace. La “décons­truc­tion” même de l’oeuvre en est l’indice. Elle per­met d’offrir un autre regard sur le réel qui s’impose.

jean-paul gavard-perret

Danilo Dueñas, Répa­rer la vision, Villa du Parc, Centre d’art contem­po­rain, Anne­masse, du 16 sep­tembre au 22 décembre 2017.

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