Encore une perle de la jubilatoire Mrs Gaskell
Ravi et fier de la toute nouvelle indépendance qui accompagne son entrée dans le monde du travail, Paul accueille avec dépit l’obligation de rendre visite à la famille de sa lointaine cousine, Phillis Holman. D’autant qu’il s’agit d’une famille fort pieuse — père pasteur, maison très isolée (“presque comme la Belle au Bois Dormant”). Rien a priori de très attractif pour le jeune citadin. Pourtant, et contre toute attente, il est vite conquis par la simplicité et la gentillesse de ces cultivateurs cultivés. Il s’en fait rapidement apprécier et augmente peu à peu la fréquence de ses visites, ne tardant pas à introduire chez eux son supérieur et ami, Holdsworth, que l’air de la campagne aidera à récupérer d’une longue maladie. L’homme est citadin de souche, grand voyageur, esprit vif et cultivé.
Aussi son séjour dans la famille de Phillis débute-t-il sur quelques tensions. Mais les divergences sont vite dépassées, et Holdsworth tombe à son tour sous le charme des Holman, marquant même une certaine inclination pour la belle et intelligente Phillis. Quand ses affaires l’amènent à quitter brutalement le pays, celle-ci comprend combien elle lui était attachée. Pensant la consoler, Paul lui révèle que ses sentiments sont partagés. Mais de douloureuses nouvelles vont bientôt briser la tranquillité de la famille, en même temps que le cœur innocent de Phillis.
Après Femmes et filles, Cranford et Les Confessions de Mr Harrison, tous trois recensés dans ces pages, les éditions de L’Herne poursuivent pour notre plus grand plaisir leur série de rééditions des œuvres injustement méconnues en France de Mrs Gaskell.
Ma Cousine Phillis est une novella — intermédiaire entre le roman et la nouvelle — qui ne déroge en rien aux exigences de qualité de son auteur : magnifiquement écrite, petit bijou de subtilité, cette histoire d’amour cruellement déçu enchantera les lecteurs.
Mais s’agissant d’Elizabeth Gaskell, on ne sera pas surprit qu’il s’agisse aussi d’une observation de son temps, perspicace et sans concession. C’est à juste titre que celle qui fut l’amie et la collaboratrice de monstres de la littérature tels que Charles Dickens, Wilkie Collins ou Charlotte Brontë se range parmi les romanciers britanniques les plus considérés de l’ère victorienne.
Et ce n’est que justice qu’elle rencontre enfin son public en France — les retirages annoncés par L’Herne de leurs précédentes parutions prouvant que le choix était judicieux.
agathe de lastyns
Elizabeth Gaskell, Ma Cousine Phillis, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Béatrice Vierne, L’Herne, mai 2012, 143 p. — 15,00 € |
||