Claire-Marie Gosselin, La Canadienne du Québec (Exposition)

Le bleu pour tout dire

Contre la pas­si­vité du mou­rir et la fai­blesse d’homme, Claire-Marie Gos­se­lin a d’abord payé de sa per­sonne dans de sublimes per­for­mances. Elle y offrait son corps pour trans­per­cer l’écran des appa­rences. Ce fut à pro­pre­ment par­ler une opé­ra­tion. C’était essayer d’atteindre le fond et de lever l’impossible, à savoir toute cen­sure puisque dès le com­men­ce­ment traînent tou­jours quelque part l’interdit et la répé­ti­tion. Elle laissa pres­sen­tir que quelque chose parle en ne se disant pas en ce pleu­re­ment sans larmes, afin que le sacré de l’œuvre jaillisse dans le pré­sent.
Depuis, l’artiste de Laval est allée vers la pein­ture pour répondre à ce crime que nous font subir par­fois les autres et que nous nous fai­sons subir à nous-mêmes. A la dou­leur elle a pré­féré des visions plus apai­sées. Elles per­mettent de faire régner contem­pla­tion et intui­tion à l’aide de pay­sages bleus. Ils annoncent une imma­té­ria­lité dans la mesure où la pein­ture devient la figure de l’intercession afin d’appeler à péné­trer dans l’invisible ici-même, ici-bas.

Par ces méta­mor­phoses plas­tiques, le monde devient en consé­quence un jar­din des pos­si­bi­li­tés. Encore faut-il que nous soyons capables de le regar­der, de le prendre afin d’entrer en fian­çailles avec lui. Pour cela, Claire-Marie Gos­se­lin réap­prend à sai­sir ce que Camus nom­mait « la tendre indif­fé­rence ». L’artiste l’a com­prise, l’a péné­trée. Elle ne cesse de tis­ser un lien entre un éso­té­risme mys­tique issu d’une sagesse, d’une tra­di­tion et une proxi­mité de la sen­sa­tion. S’éprouve une part d’éternité.
L’être et le monde peuvent ainsi y res­pi­rer l’épreuve du temps pour le dépas­ser. Et afin de réus­sir ce pari, la Qué­bé­coise demeure l’artiste la plus réser­vée qui soit. C’est sans doute pour­quoi son œuvre n’a pas sa juste place bien qu’à tra­vers elle émerge une déme­sure vitale dans ce pont entre ce qu’on voit et ce qui demeure enfoui au plus profond.

jean-paul gavard-perret

Claire-Marie Gos­se­lin, La Cana­dienne du Qué­bec, Manoir des Tou­relles, Ecouen,  du 20 juillet au 20 août 2017.

1 Comment

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One Response to Claire-Marie Gosselin, La Canadienne du Québec (Exposition)

  1. Pauline Béliveau

    Quel bel hom­mage par un écri­vain aussi célèbre et pas­sionné des arts visuels. Féli­ci­ta­tions, je suis fière de toi.

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