Louis-Stéphane Ulysse, Harold

Un cor­beau amou­reux d’une actrice des années 1960 sous l’oeil aigri d’Hitchock

Au com­men­ce­ment était une idée sti­mu­lante : revi­si­ter le célèbre film d’Alfred Hit­ch­cock : Les Oiseaux grâce à un fil (à la patte) direc­teur ori­gi­nal, soit l’un des cor­beaux figu­rants du film, ledit Harold. Et en pro­fi­ter pour cam­per au pas­sage, au gré de courts mais toniques cha­pitres, une gale­rie de per­son­nages, sou­vent des seconds cou­teaux (mais ayant réel­le­ment existé), qui gra­vitent autour du Hol­ly­wood des années 1960.
Avec Lew Was­ser­man, l’agent influent d’Universal, le pre­neur de son Gia­nelli, la star­lette Eva Beau­mont, dou­blure de Tippi Hedren, le tueur Richard “Ice­man” Kul­kinsky, Ulysse appa­raît de fait fort bien ren­sei­gné et l’on sent l’indéfectible poids his­to­rique des nom­breuses anec­dotes ici rap­por­tées et qui mêlent non sans légè­reté le tour­ment des années JFK aux frasques du rêve amé­ri­cain, en pas­sant par plé­thore de per­ver­sions : mafia, argent, sexe, chan­tage, drogue (et le rock’n roll n’est pas loin).

Mais à trop mulit­plier les pistes et les focales, le roman­cier qui se montre moins dras­tique que sir Alfred avec ses per­son­nages nous égare un peu en che­min. Le per­son­nage cen­tral de Chase, éle­veur d’oiseau appelé en ren­fort pour le tour­nage à Bodega bay, est certes inté­res­sant afin de mettre en pers­pec­tive la rela­tion cruelle unis­sant l’actrice Tippi Hedren et le cinéaste ; l’on res­sort néan­moins en par­tie frus­tré du livre tant l’on atten­dait davan­tage d’informations sur ce clas­sique du cinéma d’épouvante — de l’époque ! — qu’est Les Oiseaux.

Le roman est à décou­vrir pour son intri­ca­tion de fic­tion dans la réa­lité, laquelle par­vient sou­vent à nous faire accé­der à cette nos­tal­gique essence du cinéma hol­ly­woo­dien des six­ties. L’auteur semble tou­te­fois encore hési­ter entre le polar pur et un texte plus fan­tas­tique ou ciné­phi­lique.
L’histoire d’amour de Harold le cor­beau et de Tippi Hedren vaut bel et bien le détour — l’amour est sou­vent volatil(e) -, cepen­dant l’on ne sau­rait réduire l’ensemble du livre à elle seule, ce qui contri­bue à atté­nuer céans la ten­sion qui devrait être omni­pré­sente.

Reste donc une belle idée, laquelle, en coup de bec aux attentes de l’auteur, n’a pas su plei­ne­ment prendre son envol.

fre­de­ric grolleau

Louis-Stéphane Ulysse, Harold, Le Ser­pents à plumes, août 2010, 344 p. — 19,00 €

 

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