Luc Binet, Martin Van Maele ou le diable se cache dans les détails

Maisons closes et autres ouvertures

Van Maele fut un auteur et des­si­na­teur méconnu même s’il connut un suc­cès sul­fu­reux puisqu’il fut le maître du des­sin éro­tique. Il culti­vait — du moins dans ses œuvres — un goût appuyé pour le fouet. Citons pour le plai­sir (si l’on peut dire) : La Com­tesse au fouet, Domp­tée par le fouet, La fla­gel­la­tion amou­reuse, Le Fouet au Moyen Age, Ins­tru­ments de fla­gel­la­tion, La phi­lo­so­phie du Fouet. Et la liste n’est pas close même si les mai­sons qu’il fré­quenta assi­dû­ment le furent.
Ses belles de cas d’X sont  fidèles à leur époque : amples en chair, de telles pro­mises furent rare­ment vierges au soir de leur noces. Mais toutes se veulent des roses sans épines même si elles sacri­fient au fouet dans leur Zorro de conduite.

Refu­sant l’excrément comme le sacré mais non sans un goût pro­noncé pour Goya, Van Maele montre com­ment et pour­quoi les couples bougent, se prennent et reprennent avec plus de force leurs étreintes avec (on le subo­dore) des gro­gne­ments sourds. Le créa­teur illustre com­ment se reforme sous l’humain la bête (à moins que ce ne soit l’inverse, sûre­ment même), dès la fin du jour et jusqu’à l’aube. Du moins pour les plus vigou­reux au moment où les gro­gne­ments se changent en petits rires et les secousses des reins en bai­sers – ce qui ne retranche rien au délit d’adultère.
Cette exas­pé­ra­tion de la chair reste chez Van Maele tou­jours entre la farce et le tra­gique. L’artiste illus­tra  Les Fleurs du Mal  sans contre­sens ou cari­ca­ture. Le corps est par­fois souf­frant, par­fois jouis­sant. Face à lui, les des­sins de Van Maele laissent la pen­sée liber­tine sans en rete­nir les rênes mais sans non plus la réduire à une méca­nique arti­sa­nale. L’artiste crée à sa manière la connais­sance du « mal ». Pas ques­tion pour autant d’activer des leçons de morale. Cochon qui s’en dédit.

jean-paul gavard-perret

Luc Binet, Mar­tin Van Maele ou le diable se cache dans les détails, Edi­tions HumuS, Lau­sanne, 2017, 190 sfr.

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