Hervé Picart, L’Arcamonde — t.6 : “Le cylindre uranien”

Un voyage éru­dit dans l’univers des objets insolites 

Une fois encore Hervé Picart déniche un objet par­ti­cu­liè­re­ment inso­lite sur lequel il s’appuie pour conce­voir une intrigue prin­ci­pale qu’il entre­mêle de nom­breuses intrigues secon­daires dont cer­taines tra­versent les dif­fé­rents épi­sodes de la série.
Lau­ren découvre qu’un client, plu­tôt que de cha­par­der en douce, a laissé dans la bou­tique un objet, un cylindre en métal doré sillonné de rai­nures à cur­seur. Frans Bogaert est immé­dia­te­ment inté­ressé, dis­til­lant au pas­sage quelques anec­dotes rela­tives à des auteurs de petits lar­cins. L’objet, riche­ment décoré, avec une belle maxime latine, rap­pelle les fron­tières poreuses entre astro­no­mie, astro­lo­gie et fumis­te­rie. C’est à Haar­lem, cette vieille cité hol­lan­daise, qu’ils trouvent une pre­mière piste sur le mys­té­rieux cylindre, grâce à l’Aranea, le réseau Inter­net des anti­quaires.
Jas­per Van’t Hoff, un maître fla­mand a repré­senté le cylindre sur un tableau dont le modèle est la sœur de Chris­tiaan Huy­gens, un astro­nome réputé de La Haye. Ce peintre de dixième ordre accède à la gloire dès lors qu’il entre en pos­ses­sion de l’objet, déve­lop­pant un mode nova­teur de pein­ture de nuit. Sa renom­mée s’anéantit après un tableau où le cylindre appa­raît ouvert. Une seconde piste est don­née par un col­lège de Frans contacté par le direc­teur des archives royales de Ver­sailles. François-Louis le Gof­fic un obs­cur cour­ti­san arrivé à la cour de Louis XV en 1748 note dans ses car­nets être entré en pos­ses­sion d’un tel cylindre. Il acquiert alors une forte noto­riété comme épis­to­lier fri­pon, comme maître du billet galant. Puis, dans la seconde moi­tié du XIXe siècle, Pita­go­rio Impel­lit­teri, un obs­cur comp­table flo­ren­tin s’illustre dans la numé­ro­lo­gie dès lors qu’il entre en pos­ses­sion de cet objet, puis sombre dans l’oubli.
Alors, qui a subrep­ti­ce­ment déposé ce cylindre à l’Arcamonde et pour­quoi ? Qu’attend-t-il de Bogaert et Lau­ren ? Et puis Laura, cette épouse par­tie depuis huit ans, qui est entra­per­çue à Bruges…

Le roman­cier met en scène un mys­té­rieux cylindre aux innom­brables com­bi­nai­sons d’ouverture et dont le contenu reste impé­né­trable, réfrac­taire aux moyens modernes de détec­tion. Il plonge dans le passé, fai­sant décou­vrir les maîtres fla­mands, la vie à cour de Ver­sailles sous Louis XV, le Flo­rence du XIXe siècle… Lau­ren reste tou­jours aussi secrète et sa pré­sence dans les lieux est tou­jours aussi énig­ma­tique. Celle-ci est prise d’un besoin impé­rieux d’écriture. Elle se lance dans la rédac­tion de Zuruck, un roman met­tant en scène un numis­mate qui vit des situa­tions proches de celles de Frans, des simi­li­tudes trou­blantes au point que l’Antiquaire pense que  : “Lau­ren ne lui révèle que ce qui l’arrange et qu’elle en sait beau­coup plus.“
Le roman­cier donne l’origine et le secret de l’Arcane Maxime. Celle-ci est liée aux tra­vaux de Tycho Brahé et Kepler, ce der­nier ayant jeté les bases de l’astronomie moderne. Kepler a énoncé non pas trois, mais quatre lois. La qua­trième, ris­quant de déclen­cher les foudres des pou­voirs reli­gieux, est res­tée cachée. Bogaert en a eu connais­sance lors d’un voyage à Prague.

L’humour est tou­jours très pré­sent, un humour dans les situa­tions, dans les images rete­nues pour illus­trer des gestes, des atti­tudes, décrire des per­son­nages ou un trait de leur carac­tère. Les deux héros sont sou­vent la cible l’un de l’autre dans des dia­logues cise­lés, des échanges enle­vés, tout en finesse, tout en sub­ti­lité… Une écri­ture riche, d’une grande qua­lité avec un voca­bu­laire relevé d’une grande recherche ren­force le plai­sir de la lec­ture. De plus, Hervé Picart donne une forte envie de visi­ter les contrées si bien décrites, de flâ­ner dans les pas de Bogaert qui se fait guide, de goû­ter ces plats et ces bois­sons pro­met­teuses de délices gus­ta­tifs.
Avec Le cylindre ura­nien, l’auteur conti­nue d’enchanter son lec­teur, mul­ti­pliant anec­dotes, infor­ma­tions, sans affai­blir ni le rythme, ni l’intérêt de ses intrigues. Remarquable !

serge per­raud

Hervé Picart, L’Arcamonde - t.6 : “Le cylindre ura­nien”, avril 2017, for­mat numé­rique dis­po­nible sur toutes les pla­te­formes spé­cia­li­sées telle la FNAC au prix de 9,99 €.

 

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Filed under Pôle noir / Thriller

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